« Dahomey », film documentaire de la Franco-sénégalaise Mati Diop retrace le processus de restitution des trésors royaux du Dahomey (actuel Bénin), jadis détenus en France.
Le film « Dahomey » a été diffusé pour la première fois en salle en Côte d’Ivoire, ce vendredi 9 mai 2025, au cinéma Majestic, à Abidjan. Il a rassemblé de nombreux cinéphiles et des acteurs du secteur cinématographique.
« Dahomey », un documentaire de 1 heure 08 minutes, retrace le rapatriement par le Bénin, en novembre 2021, de 26 trésors royaux datant de l’ancien royaume du Dahomey, pillés avec plusieurs milliers d’autres lors de l’invasion des troupes coloniales françaises en 1892.
Ce film fait parler les œuvres et rend leur silence aussi audible que possible. Un silence qui semblait la plus éloquente des manières de restituer leur puissance, d’évoquer leur part secrète, opaque et inviolable, explique la réalisatrice Mati Diop.
Selon elle, attribuer une parole et un propos en Fongbé (langue béninoise) aux œuvres, à travers l’histoire « singulière » de leur expropriation, c’était choisir « d’évoquer la condition d’un territoire spolié, d’un peuple dépossédé, d’une communauté en quête de souveraineté. »
Mati Diop relève, en dépit de son allégeance à la République française, que ce film s’inscrit dans une démarche de retour vers ses origines africaines, vers une part d’elle-même longtemps « ensevelie sous l’hégémonie de son environnement occidental ».
« Dahomey » a été réalisé entre la France et le Bénin. Les quatre sessions de tournage se sont alignées sur l’agenda officiel du parcours des trésors depuis leur départ du Quai Branly, suivi du voyage en avion-cargo jusqu’à leur arrivée à Cotonou.
Il fait également intervenir la jeunesse béninoise. La réalisatrice justifie ce choix par le fait que la restitution des biens culturels africains « spoliés » pendant la colonisation française concerne en premier lieu la jeunesse africaine, qui n’avait pas encore été attendue sur ce sujet.
Par ailleurs, il est question de créer un espace qui leur permet de s’emparer de cette restitution comme de leur propre histoire, de se la réapproprier et d’être attendus, poursuit Mati Diop qui veut témoigner de ce transfert d’œuvres d’art vers leur terroir.
Au terme de la projection, le directeur général du Musée des civilisations de la Côte d’Ivoire, M. Francis Tagro Gnoléba, s’est félicité de que ce film met en évidence la prise en compte du patrimoine par la jeunesse.
Il a rappelé que les missionnaires, les expéditions punitives et les ventes légales sont les pistes de départ des patrimoines. Pour sa part, M. Laurent Bitty, producteur, a exprimé sa satisfaction pour l’œuvre, invitant les cinéastes, les réalisateurs à raconter leurs cultures et les Africains à s’approprier leur culture en repensant les stratégies pour la rencontrer.
De son côté, M. Aissi Francis Barnabé, conseiller spécial chargé des Affaires culturelles et cultuelles, a remercié la réalisatrice pour la qualité de son film. Pour lui, ce retour des trésors a été un déclic pour les Béninois.
Le film documentaire « Dahomey » a été coproduit par « Les Films du Bal » et Fanta Sy. Il a décroché l’Ours 2024 de la Berlinale.
AP/Sf/APA