La BAD et l’UA ont constaté d’importantes avancées pour certains pays africains en matière de mobilité intra-africaine, tout en soulignant que des obstacles politiques et économiques continuent de freiner l’intégration du continent.
Le dernier Africa Visa Openness Index (AVOI) 2024, publié conjointement par la Banque africaine de développement (BAD) et l’Union africaine (UA), met en lumière des avancées contrastées dans la facilitation des déplacements intra-africains. Le rapport souligne que si certains États renforcent leur politique d’ouverture, d’autres durcissent les conditions d’accès, entravant ainsi l’objectif d’une intégration continentale harmonieuse.
Dans une note positive, quatre pays – le Bénin, les Seychelles, la Gambie et le Rwanda – se distinguent en affichant un score parfait (1,0), garantissant un accès sans visa à tous les Africains. La Sierra Leone, quant à elle, réalise une progression remarquable avec une hausse de 62 % de son score, suite à la suppression des visas pour 15 pays, dont le Ghana et le Nigéria. Par ailleurs, l’essor des visas électroniques est notable, puisque 26 pays offrent désormais cette option, l’Angola ayant réduit ses délais de traitement à moins de trois jours.
Cependant, le rapport parvenu à APA dénonce également plusieurs défis. Le score moyen continental a reculé, passant de 0,485 en 2023 à 0,479 en 2024, alors que huit pays restreignent l’accès. Des ajustements de politique, comme le remplacement des visas à l’arrivée par des e-visas au Burkina Faso et au Togo, compliquent parfois les formalités. Les tensions persistantes dans des zones de conflits – notamment au Sahel et au Soudan – perturbent la libre circulation, tandis que le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Cédéao menace l’espace de libre-échange ouest-africain, même si ces pays ont assuré ouvrir leurs frontières aux ressortissants d’Afrique de l’Ouest. En outre, le coût de certains e-visas, pouvant atteindre 153 €, représente un obstacle pour les petits entrepreneurs et les voyageurs occasionnels.
La Cédéao, un modèle d’intégration régionale
Au niveau régional, la Cédéao se distingue par un taux de réciprocité de 99 % en matière de voyages sans visa, constituant ainsi un modèle d’intégration. La SADC et la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) progressent également, l’Angola étendant l’accès sans visa à 19 pays et la Tanzanie assouplissant ses règles pour l’Éthiopie.
Le rapport insiste sur l’importance stratégique de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et déplore que le Protocole sur la libre circulation des personnes n’ait été ratifié que par 4 pays sur 55. De même, le Marché unique du transport aérien africain (SAATM) pourrait considérablement renforcer la connectivité, à condition que les 37 pays signataires respectent leurs engagements.
Parmi les recommandations figurent la généralisation de visas gratuits ou à faible coût pour les voyages d’affaires liés à la ZLECAf, l’harmonisation des politiques régionales et l’accélération de la ratification des protocoles de libre circulation, ainsi que l’amélioration des plateformes de demande d’e-visas pour les rendre plus accessibles et sécurisées.
« L’Afrique ne réalisera pas ses aspirations sans régimes facilitant la mobilité. Les visas restent un obstacle aux échanges, mais des solutions comme les e-visas montrent la voie », affirme Dr. Joy Kategekwa, directrice de l’intégration régionale à la BAD.
Le rapport conclut en appelant à un « sursaut politique » afin d’atteindre l’objectif de l’Agenda 2063 de l’UA : bâtir un continent sans frontières pour ses citoyens.
AC/Sf/APA