L’UA appelle à la transformation financière pour mieux gérer la dette du continent noir qui a explosé ces dernières années, atteignant près de 2 trillions de dollars en 2024.
La première Conférence de l’Union Africaine sur la Dette s’est ouverte ce lundi à Lomé sous des auspices critiques. Prenant la parole devant les délégués réunis, M. Claver Gatete, Sous-Secrétaire général des Nations Unies et Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique, a dressé un tableau saisissant de la situation financière du continent, mêlant diagnostics alarmants et perspectives porteuses d’espoir.
« Le continent africain traverse une période particulièrement difficile sur le plan économique. La dette publique totale a explosé, atteignant 1,86 trillion de dollars en 2024, avec un ratio dette-PIB qui est passé de 44,4% en 2015 à 66,7% aujourd’hui. Plus de 20 pays africains sont au bord de la crise financière, contraints à des arbitrages douloureux entre service de la dette et investissements essentiels dans la santé, l’éducation et les infrastructures », a-t-il déclaré.
Face à cette situation, M. Gatete a proposé une stratégie ambitieuse de transformation. L’approche prônée rompt radicalement avec les pratiques antérieures. « Il ne s’agit plus d’emprunter pour consommer, mais d’investir pour transformer. Les financements doivent désormais être prioritairement dirigés vers des secteurs productifs comme l’énergie, les infrastructures et l’industrie, qui peuvent générer des retours sur investissement durables », a-t-il lancé.
La transparence et la responsabilité sont au cœur de cette nouvelle vision. Le continent doit développer des stratégies nationales exhaustives, intégrant l’ensemble des passifs, y compris ceux des entreprises publiques. Une réforme profonde de l’architecture financière mondiale est également nécessaire, avec notamment la transformation du Cadre commun du G20 et la création d’une Agence africaine de notation crédible, a-t-il ajouté.
Par ailleurs, M. Gatete a indiqué que l’innovation financière représente une autre voie prometteuse. Selon lui, les obligations vertes, bleues et les mécanismes d’échange dette-climat offrent des perspectives innovantes pour concilier impératifs financiers et enjeux environnementaux. Parallèlement, le renforcement de la mobilisation des ressources domestiques apparaît comme un levier essentiel, impliquant l’élargissement de l’assiette fiscale et la lutte contre les flux financiers illicites, a-t-il poursuivi.
Dans ce contexte, la Zone de libre-échange continental africaine (ZLECAf) constitue, d’après lui, un espoir structurel majeur. En créant un marché unique de 1,5 milliard de personnes, elle pourrait réduire significativement la dépendance du continent aux financements extérieurs et stimuler une dynamique économique endogène, espère-t-il.
Malgré la gravité de la situation, le ton de M. Gatete demeure résolument optimiste. Il estime que l’Afrique dispose d’atouts considérables : 30% des minéraux critiques mondiaux, 60% des terres arables et la population la plus jeune de la planète. « Ces ressources, combinées à une stratégie financière renouvelée, peuvent transformer les défis actuels en opportunités de développement », a-t-il souligné.
ARD/ac/Sf/APA