Alors que l’or figure parmi les principales ressources exportées du Sénégal et que le secteur extractif a rapporté plus de 236 milliards FCFA au premier semestre 2024, l’armée a démantelé 43 sites d’orpaillage illégal en mai dans l’Est du pays, une zone clé pour l’économie nationale.
Dans un contexte où le secteur extractif joue un rôle crucial dans l’économie sénégalaise, les forces armées ont intensifié la lutte contre l’orpaillage clandestin. Selon le Bulletin d’information mensuel des armées sénégalaises (n°07, mai 2025), 43 sites illégaux ont été démantelés en mai dans les localités de Bougouda, Bantanko, Fagoudou, Moussala, Moura et Saraya, situées dans le secteur stratégique de la Falémé, à la frontière malienne.
L’intervention menée dans le cadre de l’Opération orientale 1 par la Zone militaire n°4 a permis l’interpellation de 47 individus et la saisie de 77 motopompes, de motos, de groupes électrogènes et d’autres équipements, désormais entre les mains de la Gendarmerie nationale pour les suites judiciaires. Cette action s’inscrit dans la stratégie de sécurisation des zones frontalières et de lutte contre l’exploitation illégale de l’or, un enjeu économique et sécuritaire majeur.
Ce renforcement intervient au moment où le Comité national ITIE du Sénégal a publié, le 6 mai dernier, son rapport de conciliation pour le premier semestre 2024, révélant que le secteur extractif a généré 236,59 milliards FCFA de revenus sur cette période. L’or, avec une production de 106 579 onces troy évaluée à 154,46 milliards FCFA, figure en tête des ressources minières.
Les exportations d’or sur les six premiers mois de 2024 s’élèvent à 137,22 milliards FCFA, soit près de 30 % des exportations du secteur extractif, selon ce même rapport. Ces performances mettent en évidence l’importance stratégique du sous-sol sénégalais, mais aussi les risques liés à l’activité illégale.
L’orpaillage clandestin, concentré notamment dans la région de Kédougou, dans l’est, échappe en grande partie aux circuits officiels. Une étude publiée en octobre 2024 par l’ONG SWISSAID estimait qu’entre 2013 et 2022, 36 à 41 tonnes d’or, d’une valeur de 2,38 à 2,71 milliards USD, avaient quitté le Sénégal de manière illégale, souvent via le Mali et à destination des Émirats arabes unis.
Cette contrebande, alimentée par l’exploitation artisanale à petite échelle (EMAPE), demeure une faille persistante. Seuls 10 % de l’or artisanal transiteraient par les comptoirs agréés, selon une source citée par l’ISS et le CHEDS. L’introduction en 2018 d’une taxe à l’exportation de 4 % aurait encore réduit les volumes passant par les circuits officiels.
Dans ce contexte, les démantèlements de mai 2025 par l’armée sénégalaise prennent tout leur sens : ils visent à endiguer les pertes fiscales, à assécher les flux illicites et à stabiliser une région sensible au cœur de la dynamique extractive nationale.
AC/Sf/APA