Les Etats du Sahel sont victimes du terrorisme intérieur à cause de l’inefficacité des politiques de développement, a laissé entendre Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des mouvements djihadistes.
Le Burkina fait-il face à un terrorisme intérieur ?
Au Burkina Faso, au Mali, au Niger…, il est facile de dire que le djihadisme est externe ou étranger. Mais quand on étudie la situation, on se rend compte que ces groupes recrutent des locaux. De nombreux djihadistes présents au Burkina Faso sont originaires de ce pays. Itou pour le Mali, le Niger… Un mouvement djihadiste, quel qu’il soit, doit forcément recruter parmi les locaux.
Ces Etats ont du mal à l’admettre parce que c’est une sorte d’aveu de faiblesse ou d’échec. La riposte militaire, à elle seule, ne suffit pas. Les réponses doivent être économiques, sociales et militaires. Il faut clairement un changement de rapports entre le citoyen et l’administration.
Qu’est-ce qui explique la vulnérabilité du Burkina Faso face au terrorisme ?
Les raisons sont multiples. La situation économique n’est pas des meilleures. L’Armée est sous-équipée. Elle n’est pas à même de sécuriser les zones frontalières. Par contre, les groupes djihadistes sont plus aguerris. Ils s’améliorent au fil des années de lutte, recrutent en nombre et attaquent violemment.
La pauvreté est un facteur important pour expliquer le développement du terrorisme. L’Etat est un peu absent dans ces zones-là. Il est souvent répressif, n’instaure pas un système démocratique et ne met pas en œuvre des politiques de développement et de protection des citoyens. Les mouvements djihadistes en profitent donc.
Un projet de loi prévoit l’enrôlement de bénévoles dans l’armée burkinabè. Est-ce une mesure salutaire ?
Les initiatives similaires n’ont pas été concluantes dans d’autres pays. Cette mesure peut aggraver les frictions entre l’Etat central et les populations des zones où les mouvements djihadistes opèrent.
Cela peut déboucher sur la création de milices. Ces dernières se caractérisent par l’absence de discipline et la fréquence des bavures. L’enrôlement de bénévoles peut compliquer la donne pour l’armée et les populations. En soi, l’ambition de mobiliser la population est bonne mais elle peut être contre-productive.
ID/te/APA