Le retrait progressif de la Minusma a eu un impact significatif sur un environnement de sécurité et de protection déjà instable.
Le Cluster Protection, regroupant les organisations non gouvernementales œuvrant pour la protection des personnes touchées par les conflits, a enregistré 16 041 violations des droits humains en 2023, marquant une augmentation de 86 % par rapport à l’année précédente.
Ces violations ont été constatées lors de 6 327 incidents, indiquant une détérioration accrue du contexte sécuritaire et de protection au cours de l’année. Selon ces organisations, ces chiffres, bien que déjà élevés par rapport à 2022, sous-estiment la réalité, principalement en raison d’un sous-rapportage persistant de la part des communautés de plus en plus exposées à l’insécurité et réticentes à partager des informations de peur de subir des représailles, ainsi que des difficultés d’accès empêchant une évaluation exhaustive des incidents de protection dans certaines zones inaccessibles.
Les violences perpétrées par des groupes armés non étatiques contre les populations civiles ont exposé ces communautés à de nombreuses violations et risques de protection, les contraignant à des déplacements préventifs et forcés à l’intérieur et à l’extérieur des frontières.
En 2023, les mouvements de population ont augmenté de 254 %, tandis que les atteintes à l’intégrité physique et psychologique ont augmenté de 78 % par rapport à l’année précédente, avec 3 212 cas enregistrés contre 1 806 en 2022. Parmi les victimes de violations des droits humains, 3 255 étaient des personnes déplacées internes.
En outre, 62 % des incidents de protection ont été enregistrés à Mopti (10 067) et 20 % à Tombouctou (3 193), marquant une augmentation de 109 % et 96 % respectivement par rapport à 2022. Comme précédemment, la grande majorité des violations ont touché les communautés d’accueil (68 %).
Le retrait progressif de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) suite à la résolution 2690 (2023) du Conseil de sécurité de l’ONU, suivi du transférant les bases aux autorités maliennes, a eu un impact significatif sur un environnement de sécurité et de protection déjà instable, en particulier dans le centre et le nord du pays. La reconquête du territoire national par les Forces armées maliennes et la reprise des hostilités dans les zones des trois frontières et du centre ont affecté l’environnement de protection des civils sur le terrain.
Ces développements ont directement entraîné une augmentation des affrontements dans le nord et le centre du pays, la multiplication des engins explosifs, ainsi que la mise en place de blocus dans différentes localités du centre (Boni, Bara Sara, Markala) et du nord du pays (Tombouctou, Goundam, Gourma-Rharous, Dire Ber), ainsi que sur plusieurs axes routiers, notamment Douentza-Gao et Douentza-Tombouctou (RN16).
Les attaques et l’encerclement des villages du centre du pays ont également eu un impact sur l’accès aux biens de première nécessité et aux services de base tels que la santé, l’eau, l’éducation, la police, la justice et les marchés. L’accès à l’assistance humanitaire est également entravé par l’insécurité croissante dans les zones touchées par les conflits armés.
Les restrictions de mouvement imposées par les groupes armés non étatiques, telles que l’interdiction d’exploiter les champs ou d’accéder aux marchés, limitent l’accès des populations aux activités économiques et aux moyens de subsistance, les poussant à développer des mécanismes d’adaptation négatifs.
En interrogeant des ménages affectés par ces restrictions de mouvement en 2023, ces organisations ont identifié principalement des opérations militaires, la présence d’engins explosifs improvisés (EEI) et de restes explosifs de guerre (REG), ainsi que des tensions intercommunautaires, comme principales sources d’insécurité. Certains ménages ont affirmé ne pas se sentir en sécurité dans leur communauté, tandis que d’autres ont déclaré ne pas avoir accès aux services essentiels.
MD/ac/APA