Lors d’une conférence à Addis-Abeba, des représentants gouvernementaux et des parties prenantes ont appelé à une réforme profonde de l’architecture financière mondiale pour mieux répondre aux besoins de développement de l’Afrique.
Les parties prenantes et les représentants des gouvernements participant aux consultations de la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement en Afrique, à Addis-Abeba en Éthiopie, ont appelé mardi à une refonte de l’architecture financière mondiale, soulignant la nécessité de la réformer pour qu’elle représente équitablement les besoins de l’Afrique et y réponde.
La conférence de deux jours, organisée par la Division macroéconomie, finance et gouvernance de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a examiné les besoins de financement de l’Afrique afin d’élaborer une approche concertée en vue du quatrième Forum pour le développement (FdD4) qui se tiendra à Séville, en Espagne, en juin 2025.
Dans son discours, Claver Gatete, secrétaire exécutif de la CEA, a souligné la nécessité d’une réponse unifiée aux défis posés par la pandémie de Covid-19, les tensions géopolitiques et la récession économique qui ont mis le continent à rude épreuve.
« L’Afrique est aujourd’hui confrontée à un déficit de financement pouvant atteindre 1,3 billion de dollars par an pour atteindre ses objectifs de développement durable d’ici à 2030 », a-t-il déclaré.
« En 2023, la dette extérieure du continent dépassera les 1 000 milliards de dollars, avec des paiements d’intérêts annuels extrêmement élevés, ce qui limitera notre capacité à financer le développement essentiel ».
Pour tracer une nouvelle voie, M. Gatete a proposé des mesures réalisables pour guider les pays, soulignant la nécessité de systèmes financiers qui donnent la priorité aux ODD, à l’Agenda 2063 et à l’action climatique, tout en tirant parti des financements concessionnels et d’une solide mobilisation des ressources nationales.
Il s’agit notamment d’élargir l’assiette fiscale; de renforcer la conformité fiscale et de numériser les systèmes pour qu’ils soient plus efficaces et efficients ; d’examiner et de cibler les incitations fiscales pour s’assurer qu’elles apportent de véritables avantages aux communautés, aux emplois et aux économies ; et de lutter contre les fuites de recettes, les flux financiers illicites et l’évasion fiscale dans les actifs numériques et cryptographiques, afin de conserver le capital nécessaire au développement de l’Afrique.
« Il est essentiel que l’Afrique bénéficie d’un allègement immédiat du service de la dette. La révision du cadre commun du G20 afin d’y inclure des procédures de restructuration accélérées contribuerait également à permettre aux pays africains de gérer leur dette de manière durable. En outre, l’extension de l’initiative de suspension du service de la dette offrira un répit aux économies en difficulté », a-t-il ajouté.
Semereta Sewasew, ministre éthiopienne des Finances, a exhorté les pays à s’engager pleinement lors de la quatrième conférence internationale pour le développement afin de définir l’approche de l’Afrique et d’obtenir un financement essentiel pour le développement.
Elle a déclaré que les pays africains devraient mettre en œuvre des stratégies de gestion durable de la dette et alléger le fardeau de la dette afin de libérer des ressources pour les services sociaux et le développement.
« De nombreuses nations africaines allouent des revenus substantiels au service de la dette plutôt qu’à des secteurs cruciaux comme l’éducation et les soins de santé. Il est nécessaire d’adopter une approche coordonnée impliquant à la fois les secteurs public et privé, qui puisse agréger les charges et permettre une allocation des ressources plus productive », a-t-elle déclaré.
Le financement traditionnel seul, a-t-elle souligné, est insuffisant pour relever ces défis, lesquels nécessitent des mécanismes innovants tels que les échanges de dette contre climat, le commerce du carbone et les obligations climatiques.
« Le renforcement de la capacité de mobilisation des ressources nationales est essentiel pour répondre aux besoins de développement de l’Afrique et réduire la dépendance à l’égard de l’aide », a-t-elle déclaré, soulignant que la modernisation des systèmes fiscaux, l’amélioration de la collecte et l’expansion des économies formelles sont des stratégies essentielles pour mobiliser les ressources nationales.
Albert Muchanga, commissaire chargé du commerce et de l’industrie à la Commission de l’Union africaine, a souligné la nécessité de disposer d’assiettes fiscales indépendantes sur le continent, de collaborer avec les organisations internationales et de tirer parti de la coopération fiscale internationale afin de mobiliser efficacement des ressources financières pour le continent.
Il a noté la nécessité d’une architecture financière mondiale solide, transparente et inclusive pour soutenir les programmes de réduction de la pauvreté et a insisté sur l’importance de la collaboration entre l’UA et la CEA pour améliorer la politique étrangère et l’efficacité opérationnelle. Il a également souligné l’importance des statistiques et des données pour atteindre les objectifs financiers.
De son côté, Li Junhua, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a souligné la nécessité de réformer l’architecture financière internationale pour soutenir le développement durable.
Il a ajouté que l’élargissement du fossé financier et le fardeau de la dette auxquels sont confrontés les pays africains, entravent l’investissement dans les ODD et l’action climatique.
« L’urgence du moment exige des actions concrètes axées sur l’augmentation de l’espace fiscal pour les investissements dans les ODD et un système multilatéral qui soutienne les efforts nationaux », a déclaré M. Junhua.
« J’encourage les parties prenantes à s’engager activement afin que personne ne soit laissé pour compte dans la poursuite du développement durable », a-t-il ajouté.
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