Les Conseils de la République de Côte d’Ivoire ont exprimé leur crainte sur la «réalité du risque de fuite» de Laurent Gbagbo, l’ex-président ivoirien en liberté conditionnelle en Belgique si celui-ci recouvre une liberté totale alors que la procédure ouverte contre lui à la Cour pénale internationale (CPI) n’est pas encore terminée.
A travers un document consulté jeudi par APA et intitulé observations de la République de Côte d’Ivoire sur la «requête de la défense afin d’obtenir que la Chambre d’appel restitue à Laurent Gbagbo acquitté de toutes les charges portées contre lui, l’intégralité de ses droits humains fondamentaux», l’État de Côte d’Ivoire entend aider la Cour à prendre « la meilleure décision dans l’intérêt de la justice et de la paix».
M. Gbagbo a été acquitté mi-janvier 2019 par la CPI de toutes les charges portées à son encontre et libéré sous conditions avec résidence à Bruxelles. Le 16 septembre dernier, le procureur de la CPI a déposé un acte d’appel contre cette libération de M. Gbagbo.
Quant aux avocats de l’ex-président, ils ont déposé depuis le 07 octobre dernier, une requête afin d’obtenir la libération totale de M. Gbagbo avec en ligne de mire son retour en Côte d’Ivoire.
« Il faut s’assurer que la décision sur la liberté ne compromette pas l’appel interjeté contre l’acquittement. En effet une mise en liberté totale, sans conditions, ne devrait être envisagée que si M. Gbagbo présente de solides garanties de représentation. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce et la gravité des charges et le risque qui s’ensuit de condamnation à une lourde peine, I’existence d’un réseau de partisans et les moyens dont dispose Laurent Gbagbo sont de nature à I’inciter à prendre la fuite», ont fait remarquer les maîtres Jean-Pierre Mignard, Jean-Paul Benoît, Pierre-Emmanuel Blard, Mamadou Koné et Ben Abdoulaye Méïté, les avocats de l’État ivoirien.
Selon eux, la fuite de M. Gbagbo engendrerait de « graves conséquences » pour l’autorité de la Cour, l’administration de la justice, le droit des victimes, la République de Côte d’Ivoire et ainsi pour l’ordre public international.
Les avocats de l’État ivoirien soutiennent par ailleurs, que le retour de M. Gbagbo en Côte d’Ivoire serait un facteur de «grave désordre» puisque M. Gbagbo et ses partisans ne manqueraient pas d’exploiter la décision d’acquittement de la Chambre de première instance pour contester à la République de Côte d’Ivoire toute coopération avec la Cour durant la poursuite de la procédure.
« La mise en liberté sans conditions de M. Gbagbo affecterait gravement le droit des victimes de voir reconnaître leurs préjudices et ainsi d’espérer obtenir quelque réparation que ce soit», poursuit le document, estimant que parmi les conditions posées par la Chambre d’appel, aucune ne prive M. Gbagbo de ses droits civils et politiques comme le prétendent ses avocats.
« Pour toutes ces raisons, la République de Côte d’Ivoire estime que la décision du 1er février 2019 rendue par la Chambre d’appel a réduit la liberté d’aller et venir de M. Gbagbo au strict nécessaire pour garantir sa représentation devant la justice, ainsi que la sécurité de tous, y compris la sienne. Elle est ainsi juste, équilibrée et proportionnée», ont conclu les conseils de l’État ivoirien.
Laurent Gbagbo, l’ex-président ivoirien et Charles Blé Goudé, son ancien ministre de la jeunesse, ont a été acquittés en janvier 2019 et libérés sous conditions par la CPI des charges de crimes contre l’humanité commis pendant la crise postélectorale ivoirienne de 2010-2011.
Depuis lors M. Gbagbo réside à Bruxelles en Belgique alors que son ex-co-détenu est au Pays-Bas. Ils sont tous les deux en attente de la fin de la procédure à leur encontre car le procureur de la CPI a fait appel contre la décision d’acquittement. Une audience de la Chambre d’appel de la CPI est d’ailleurs prévue le 06 février prochain à la Haye.
LB/ls/APA