L’éditorialiste et spécialiste de la géopolitique africaine, Seidik Abba dénonce l’absence de l’Union africaine dans la résolution de la crise libyenne.
Au moment où la Turquie décide d’envoyer des troupes en Libye, l’Union africaine semble absente. Comment expliquer cela?
Il s’agit clairement d’une démission de l’Union africaine. Là Libye est un pays africain et on ne voit pas l’Union africaine rechercher des solutions à sa crise, même si elle a créé un comité de suivi de cette crise et qui est présidé par le président congolais, Dénis Sassou Nguesso. L’Union africaine rate ainsi une occasion d’assumer son leadership dans une crise majeure qui secoue le continent.
Qu’est-ce qui explique cela ?
Il y a d’abord le fait que les Africaine n’ont pas la même position. Il y a l’Égypte qui a une position partisane et soutient le général Khalifa Haftar. L’Union africaine devait taper sur la table et s’imposer comme leader comme elle l’a fait au Soudan. Il faut assumer et même arracher le leadership dans cette crise. Cela fera la crédibilité de l’Union africaine.
Est-ce toujours possible?
Il n’est jamais trop tard. On ne peut pas régler le dossier libyen sans se soucier des pays voisins. Il faut une solution africaine. Tout le monde sait que la crise libyenne a aggravé la situation au Sahel. Les armes sont passées partout, les combattants jihadistes se sont infiltrés en Libye. Il y a aujourd’hui le besoin d’une solution africaine en Libye. Avec une meilleure implication des acteurs africains, on pourrait arriver à une fin de cette crise.
L’Egyptien Abdel Fatah Al Sissi préside l’Union africaine et il soutient l’un des belligérants du conflit libyen, Khalifa Haftar…
La position de l’Égypte dans la crise libyenne pose problème. L’Egypte n’est pas neutre. Elle soutient Haftar. Elle n’est donc pas un acteur crédible. Mais on peut espérer que dès février quand il y aura une nouvelle présidence de l’Union africaine celle-ci pourra faire avancer le dossier. C’est un grand espoir pour tous.
Quelle serait la solution pour vous?
La solution de l’Union africaine, c’est qu’il faut une solution pacifique avec un agenda clair et précis. La solution est quasiment connue. Elle ne pose pas de problème. Mais le fait qu’il y ait une présidence de l’Union africaine avec le président d’un pays qui n’est pas neutre pose problème. C’est pourquoi, il y a Le besoin d’une concertation, que la solution africaine soit réclamée et que les pays voisins soient associés.
Mais avant présidence d’Al Sissi à l’Union, la situation en Libye était déjà assez grave…
C’est vrai que le problème libyen ne date pas de l’élection de l’arrivée du président égyptien à la tête de l’Union africaine. Mais la situation s’est aggravée. Le niveau d’ingérence n’était pas au même niveau. L’offensive de Haftar sur Tripoli date d’avril. Beaucoup de pays ont soutenu cette offensive. Aujourd’hui la situation s’est complètement dégradée. Il y a lieu d’aller vite. Avec un leadership africain, on peut espérer que la magie qui s’est produite au Soudan se reproduit en Libye.
TE/los/APA