Le décès, la veille de l’ancien Premier ministre Sadou Hayatou côtoie, dans les journaux camerounais parus vendredi, les tribulations gouvernementales face à la crise sécessionniste anglophone et au sort des prisonniers politiques.
Dans un bel élan, Cameroon Tribune, InfoMatin, Le Jour, Le Messager, L’œil du Sahel, Mutations et The Guardian Post, saluent la mémoire de l’ex-chef du gouvernement, qui la veille a passé l’arme à gauche dans un hôpital suisse à l’âge de 77 ans.
C’était l’ami personnel du président Paul Biya, signale Le Messager. Et InfoMatin de rappeler que c’est lui qui, nommé le 26 avril 1991, a dirigé le gouvernement lors des crises sociales les plus profondes ayant accompagné la réinstauration du multipartisme.
M. Hayatou, insiste Mutations, a managé l’un des dossiers les plus complexes visant à sortir le pays des «années de braise», la conférence Tripartite du 30 octobre au 17 novembre 1991 entre le pouvoir, l’opposition et la société civile qui mit fin aux troubles sociopolitiques.
Quelques pages plus loin, et le même journal, qui en fait par ailleurs sa grande manchette, se penche sur le cas du «grand muet bavard» à la tête du ministère de la Justice, Laurent Esso qui «change de disque» dans la gestion des urgences : réputé taiseux et secret, l’homme semble ébranlé depuis la mutinerie survenue voici 10 jours à la prison centrale de Yaoundé-Kondengui, lui qui fait fuiter des correspondances adressées à certaines personnalités au sujet de ces événements.
Cette personnalité, restée célèbre avec sa formule-choc «les urgences, c’est à l’hôpital», vient de demander aux chefs des cours d’appel des 10 régions de lui faire parvenir leurs suggestions en vue de la réduction des lenteurs judiciaires, à l’origine du soulèvement des prisonniers.
«Crise dans les prisons : Laurent Esso plaide coupable», appuie L’œil du Sahel ; «Surpopulation carcérale : Laurent Esso passe aux aveux», moque Essingan, constatant que le membre du gouvernement, après des années de léthargie, tente de reprendre la main pour décongestionner les prisons.
Et voici que Paris nous rappelle aux tristes réalités de la crise post-présidentielle et de la guerre sécessionniste dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest : Le Jour, sous le titre «Crise sociopolitique : la France préoccupée par l’inculpation de Kamto», profite d’une déclaration du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères qui dit suivre, avec une grande attention, la situation de l’ancien candidat à la présidentielle et leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc, opposition), arrêté le 28 janvier dernier avec près de 200 de ses partisans et inculpé depuis mi-février notamment pour rébellion, insurrection et hostilité contre la patrie.
La France relève également que la situation dans les régions anglophones du Cameroun continue à se dégrader. Bien plus, elle rappelle que les pertes humaines y sont lourdes, que la situation humanitaire est critique (35.000 réfugiés au Nigeria et 530.000 déplacés internes) et que l’activité économique dans ces régions s’effondre.
Pour l’Hexagone, renchérit The Guardian Post, la solution à la guerre sécessionniste n’est pas militaire mais politique. Comme la France, le Cameroun peut encore compter sur des partenaires bienveillants par ces temps difficiles, ajoute le quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune qui salue, sur 4 colonnes en couverture, l’offre de près de 240 millions FCfa du Japon et du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), en vue du financement de projets de développement en faveur des populations victimes de l’instabilité sociopolitique dans les régions anglophones.
FCEB/cat/APA