L’Alliance pour la République (APR), l’ex-parti au pouvoir qui pourrait perdre sa majorité au parlement dans les prochains jours, a présenté jeudi un livre-bilan sur les douze ans de gestion de Macky Sall.
Critiqué pour son bilan socio-politique et sa gestion des deniers publics par les nouvelles autorités sénégalaises, l’ancien président Macky Sall (2012-2024) a trouvé en ses militants des défenseurs acharnés de son action à la tête du pays. Dans un document de 200 pages intitulé « Macky Sall, 12 ans à la tête du Sénégal », les responsables de l’Alliance pour la République (APR, opposition) sont revenus jeudi, lors d’une cérémonie organisée au siège de l’ex-parti présidentiel, sur les grandes réalisations de leur leader.
Selon eux, ses réalisations sont marquées par une forte croissance, une politique d’inclusion sociale et une équité territoriale en faveur d’un Sénégal émergent. « Le Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC), le Programme des bourses de sécurité familiale, la Couverture maladie universelle et l’emploi des jeunes constituent les marqueurs sociaux de l’action du président Macky Sall à la tête du Sénégal », a rappelé Seydou Guèye, porte-parole de l’APR. Qualifiant Macky Sall de « scientifique aux valeurs politiques de solidarité et de partage, deux fondements de la stabilité et de la paix durable ».
Plusieurs dignitaires de l’ancien régime, notamment les anciens ministres Sidiki Kaba et Aissata Tall Sall, se sont succédé au micro pour rappeler à leurs camarades de parti qu’ils doivent être fiers du bilan de leur leader politique qui vit entre la France et le Maroc depuis qu’il a quitté le pouvoir le 2 avril dernier.
Triple dissolution ?
L’APR, principal parti au sein de l’ex-coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY, Unis pour un même espoir), pourrait perdre sa majorité à l’Assemblée nationale dans les prochains jours, alors que le chef de l’Etat a soumis jeudi un projet de loi pour dissoudre le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ainsi que le Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT). Pour plusieurs observateurs, la suppression de ces deux institutions, jugées budgétivores par le nouveau régime, n’est qu’une première étape avant la dissolution de l’actuelle législature, relativement dominée par des députés de BBY.
Selon Ousseynou Ly, un des conseillers de Bassirou Diomaye Faye, le Conseil constitutionnel a récemment notifié au président de la République qu’il pourrait dissoudre le parlement à compter du 12 septembre prochain, soit deux ans après son installation, et organiser des élections législatives dans un délai de trois mois. Cette nouvelle donne politique pourrait profondément désavantager le parti de Macky Sall, déjà abandonné par certains militants cinq mois après la perte du pouvoir et la défaite de l’ancien Premier ministre Amadou Ba, candidat de BBY, dès le premier tour de la dernière présidentielle.
Le 13 juillet dernier, le nouveau chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Faye, a rencontré la presse locale à l’occasion de ses cent premiers jours au pouvoir, pour signaler que « les indicateurs économiques étaient au rouge » à son arrivée, et qu’il n’avait même pas trouvé d’argent dans la « caisse noire ». Ces fonds politiques, estimés à des milliards de francs CFA, sont annuellement alloués au président de la République et laissés à sa discrétion, ce qui donne à penser que son prédécesseur, Macky Sall, les aurait épuisés en l’espace de trois mois.
Premiers engagements
Toutefois, le président Faye estime que son gouvernement a su se serrer la ceinture pour honorer ses premiers engagements envers la population, notamment à travers la baisse des prix des produits de consommation. A titre d’exemple, il indique que des coupures de courant menaçaient le Sénégal car l’Etat n’avait pas payé les fournisseurs d’hydrocarbures. Il a donc fallu trouver des mécanismes pour convaincre ces partenaires.
« Nous avons procédé à une réallocation des ressources financières en fonction des priorités, afin de pouvoir réduire le coût des denrées de consommation courante », a noté le dirigeant de 44 ans, qui a publié, dès sa prise de fonction, plusieurs rapports des principaux corps de contrôle que Macky Sall avait « mis sous le coude ». Ces rapports épinglent des dysfonctionnements dans la gestion des fonds publics par des personnes investies de responsabilités sous l’ancien régime.
Alors que la reddition des comptes est réclamée par une grande partie de l’opinion, le président Faye a récemment nommé de nouveaux juges, y compris les nouveaux membres du parquet national financier, qui a remplacé la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI).
Écartant « tout esprit de vengeance », le président sénégalais affirme que justice sera rendue concernant les détournements de deniers publics, l’accaparement de terres ainsi que les morts lors des violentes manifestations ayant précédé l’arrivée au pouvoir de son parti, Pastef, et qui ont fait près de 80 victimes, principalement tuées par balle.
ODL/ac/Sf/APA