Quelques jours après la mise en échec d’un projet terroriste à Had Soualem, le Bureau Central d’Investigations Judiciaires du Maroc (BCIJ) a annoncé, lors d’une conférence de presse tenue à son siège à Salé, que le démantèlement d’une cellule terroriste a permis d’enrayer une initiative particulièrement dangereuse.
L’opération anti-terroriste de grande envergure, menée par le Bureau Central d’Investigations Judiciaires du Maroc (BCIJ) à Had Soualem, dans la région de Casablanca-Settat, a permis d’arrêter quatre individus affiliés à l’organisation terroriste État islamique, évitant ainsi une série d’attentats ciblant des installations sécuritaires et des lieux fréquentés par des civils, notamment un supermarché prisé des expatriés.
Baptisée « Cellule des Trois Frères », cette organisation clandestine se composait de trois frères et d’un complice, tous impliqués dans une planification méthodique visant à semer la terreur au Maroc. Selon Chakib Haboub, directeur du BCIJ, les investigations ont révélé un niveau de préparation avancé, incluant des repérages minutieux des cibles, la réalisation de croquis détaillés des lieux et la collecte de matériel chimique destiné à la fabrication d’explosifs artisanaux.
L’enquête a révélé une organisation rigoureuse : les membres de la cellule avaient photographié leurs cibles sous plusieurs angles, étudié les itinéraires d’accès et élaboré des plans d’évasion. Pour dissimuler leurs intentions, ils avaient réparti leurs achats d’équipements et de substances chimiques entre plusieurs commerces, une technique visant à éviter toute détection des autorités.
Par ailleurs, des couteaux de différentes tailles ont été saisis, renforçant la thèse d’attaques de type « loup solitaire », souvent encouragées par les réseaux terroristes. Des vidéos d’instructions en provenance de la branche sahélienne de l’Etat islamique ont également été découvertes parmi les effets personnels des suspects. Ces enregistrements, contenant des images d’exécutions et de décapitations, étaient destinés à endoctriner les recrues et à les former aux méthodes de combat et d’attentat.
Face à la gravité de la menace, le BCIJ a orchestré une intervention minutieuse en deux temps. Dimanche dernier, les forces spéciales marocaines ont mené un raid stratégique, appuyé par des unités d’élite et des tireurs d’élite, ainsi qu’un hélicoptère de la Gendarmerie royale mobilisé pour sécuriser la zone.
Dans la première phase, trois suspects ont été arrêtés et un important arsenal a été saisi : des couteaux, des substances chimiques dont du soufre, de la poudre de charbon, des engrais chimiques et d’autres composants utilisés pour la fabrication d’engins explosifs. Des unités K-9 spécialisées dans la détection d’explosifs ont minutieusement fouillé les lieux afin d’éliminer tout risque.
Quelques heures plus tard, la deuxième phase de l’opération a abouti à l’arrestation du quatrième suspect, mettant définitivement hors d’état de nuire cette cellule jihadiste. Cette intervention témoigne de l’expertise des forces marocaines en matière de lutte antiterroriste et de leur capacité à neutraliser des menaces avant leur passage à l’acte.
La radicalisation familiale, nouveau mode de recrutement
L’un des aspects les plus inquiétants mis en avant par le BCIJ est la stratégie de radicalisation adoptée par la cellule : l’aîné des trois frères avait réussi à embrigader ses cadets, illustrant une tendance croissante à la radicalisation intra-familiale. Cette dynamique rend la détection des profils à risque plus difficile pour les services de renseignement, les liens familiaux offrant une couverture discrète aux activités terroristes.
Les experts en sécurité présents à la conférence de presse ont alerté sur l’utilisation accrue des réseaux sociaux et des plateformes de messagerie cryptées pour recruter et former de nouveaux adeptes. De plus, le faible niveau d’éducation des membres arrêtés reflète une stratégie bien connue des groupes terroristes, qui ciblent des individus vulnérables en manipulant des références religieuses hors contexte pour justifier leur idéologie extrémiste.
Ce démantèlement intervient dans un contexte régional marqué par une montée en puissance des groupes terroristes au Sahel. D’après les informations recueillies par le BCIJ, la cellule neutralisée projetait de rejoindre les camps de l’Etat islamique dans la région du Sahel après avoir commis des attentats au Maroc. Le frère aîné, considéré comme le cerveau du groupe, avait même prévu d’emmener ses cinq enfants, soulevant de sérieuses inquiétudes quant à la persistance du phénomène des « familles jihadistes ».
Les données dévoilées par le BCIJ révèlent que depuis 2022, plus de 40 cellules terroristes liées à Al-Qaïda ou l’Etat islamique ont été démantelées au Maroc, tandis que 130 extrémistes marocains ont rejoint des foyers jihadistes en Somalie et au Sahel. Ces chiffres illustrent la nécessité d’un renforcement continu des mesures de surveillance et de prévention face à cette menace transnationale.
Le directeur général de la surveillance du territoire (DGST) avait déjà mis en garde contre la montée en puissance d’Al-Qaïda dans la région, avertissant que le Sahel pourrait devenir un nouveau pôle du terrorisme international. La dernière opération du BCIJ confirme cette analyse et met en avant l’importance pour le Maroc de maintenir un dispositif sécuritaire robuste.
Une coopération internationale renforcée
L’ampleur de la menace a conduit le Maroc à renforcer ses partenariats sécuritaires. Le Département d’État américain a récemment salué le pays comme un « partenaire essentiel » dans la lutte contre le terrorisme, valorisant l’approche marocaine combinant opérations de terrain, coopération régionale et initiatives de déradicalisation.
Dans cette optique, le patron de la DGSN-DGST, Abdellatif Hammouchi, a rencontré ce mois-ci le commissaire général espagnol à l’information, Javier Antonio Susin Bercero, afin de discuter de l’évolution des menaces terroristes, notamment celles émanant du Sahel et du Sahara. Interpol a également souligné l’efficacité des capacités marocaines en matière de lutte antiterroriste lors d’un congrès international sur la sécurité chimique organisé à Marrakech.
Alors que le Maroc se prépare à accueillir la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et la Coupe du Monde 2030, les autorités redoublent d’efforts pour assurer la sécurité du territoire. Ces événements mondiaux, qui attireront des millions de visiteurs, constituent des cibles potentielles pour les groupes terroristes.
Conscient de cet enjeu, le royaume met en place des dispositifs de surveillance accrus, combinant technologies avancées, renforcement des forces de sécurité et coopération internationale. Le démantèlement de la « Cellule des Trois Frères » illustre la vigilance permanente des autorités marocaines face à une menace terroriste en constante mutation.
Le Maroc, fort de son expertise en matière de lutte contre l’extrémisme, poursuit ainsi sa mobilisation pour garantir la sécurité de ses citoyens et de ses visiteurs, tout en consolidant son rôle de rempart contre la menace djihadiste en Afrique du Nord.
Le Maroc renforce ses efforts pour assurer la sécurité des compétitions de la CAN 2025 et de la Coupe du Monde 2030, à mesure que leur organisation se précise.
MK/ac/Sf/APA