En visite depuis dix jours dans la région du Lac où il supervise l’opération militaire Haskanite, le président Mahamat Idriss Deby Itno a accordé une interview ce jeudi 7 novembre. Face à l’absence de réciprocité dans la lutte contre le terrorisme, notamment après l’attaque du 27 octobre contre une position de l’armée tchadienne à Barkaram, le chef de l’État annonce le retrait du Tchad de la Force multinationale mixte (FMM).
Le général Mahamat Idriss Deby Itno, président de la République du Tchad, s’est exprimé ce jeudi 7 novembre depuis la région du lac Tchad, où il dirige personnellement l’opération militaire Haskanite, lancée en réponse à l’attaque du 27 octobre contre une position de l’armée tchadienne à Barkaram, dans la région du Lac.
Face aux inquiétudes de la population concernant sa présence prolongée dans la zone du lac Tchad depuis dix jours, le président a tenu à justifier sa décision. « En tant que Président de la République, chef de l’état, chef suprême des armées, garant de la sécurité de nos concitoyens, garant aussi de l’intégrité territoriale de notre pays, il est de mon devoir de venir au lac Tchad », a-t-il indiqué. Le chef de l’État tchadien a souligné l’importance d’être sur le terrain pour prendre les bonnes décisions, évoquant son passé militaire : « Je suis un soldat et en tant que soldat je sais que pour prendre de bonnes décisions en ce qui concerne la sécurité, il faut être sur le terrain. »
Le président Deby a détaillé les objectifs de sa présence, qui sont de constater la situation et compatir avec ses frères d’armes, réorganiser le dispositif militaire, et lancer l’opération Haskanite pour venger les martyrs et éradiquer ce qu’il qualifie de « bandits des grands chemins ».
S’agissant de l’opération en cours, le chef de l’État a fait savoir que plusieurs frappes aériennes ont déjà été menées contre les « positions ennemies », causant de nombreuses pertes dans leurs rangs, et que les forces terrestres sont désormais prêtes à entrer en action.
L’état d’esprit des troupes est au cœur des préoccupations du président tchadien, qui a insisté sur leur excellent moral. « Ils sont même pressés, très pressés depuis le début du lancement de cette opération », a-t-il relevé, précisant que cette combativité fait partie « de l’ADN de l’armée tchadienne » qui « n’a jamais baissé les bras contre l’ennemi ».
Le président tchadien a saisi l’occasion pour annoncer la décision de son pays de se retirer de la Force multinationale mixte (FMM). Pour justifier ce choix, il a rappelé l’engagement constant du pays dans la lutte contre le terrorisme depuis 2013, énumérant les interventions au Mali avec l’opération Fatima, la participation au G5 Sahel, et les opérations menées au Niger et au Nigeria, notamment Lac City One et Two. Toutefois, il a déploré l’absence de réciprocité : « Quand notre pays, le Tchad, est frappé par l’ennemi, aucun soutien. Est-ce que vous avez vu une fois parmi les pays avec lesquels nous avons formé des forces mixtes en commun venir soutenir le Tchad ? »
Cette situation a conduit à une réorientation stratégique, Mahamat Idriss Deby Itno estimant qu’il est temps pour l’armée de se concentrer sur la protection des citoyens et du territoire tchadien. Il a néanmoins tenu à préciser que « cela n’empêche pas le Tchad de respecter ses engagements de la lutte contre le terrorisme ». Pour lui, l’absence de solidarité remet en question l’intérêt même de cette force multinationale pour son pays.
En outre, le président a voulu rassurer ses compatriotes en affirmant que « la situation est sous contrôle » et que « l’armée tchadienne contrôle à 100% nos frontières ». Il s’est engagé à ce que les forces armées poursuivent l’ennemi « pour qu’il n’y ait plus de bohama ou de bakra ». Le chef de l’État a également exprimé sa gratitude envers le peuple tchadien pour son unité et son soutien dans cette épreuve, tout en présentant ses condoléances aux familles des martyrs et en souhaitant un prompt rétablissement aux blessés. Il a appelé ses concitoyens à maintenir leur confiance envers les forces de défense et de sécurité nationales, « comme ils l’ont toujours fait ».
AC/Sf/APA