Mogadiscio, qui revendique la république autoproclamée du Somaliland comme territoire souverain, a déjà mis en garde l’Éthiopie contre toute ingérence dans les affaires de cette enclave d’un peu plus de 6 millions d’habitants.
L’Éthiopie aurait transformé son bureau consulaire à Hargeisa, la capitale du Somaliland, en une véritable ambassade, une décision qui ne devrait pas plaire à Mogadiscio, en Somalie, qui revendique toujours l’enclave.
Selon le ministre de l’Information et de la Culture du Somaliland, Ali Mohamed Hassan, sur X (anciennement Twitter), cette transformation a été annoncée par le président Musa Bihi Abdi lors d’un discours à la nation marquant les 33 ans de la déclaration d’indépendance de l’enclave par rapport à la Somalie, alors dévastée par une guerre civile.
Ce discours intervient une semaine après que le président éthiopien Sahelework Zewdie a nommé Delil Kedir Bushra comme envoyé de l’Éthiopie au Somaliland, qui est toujours considéré sur le plan international comme une partie intégrante de la Somalie.
Mogadiscio, qui revendique la république autoproclamée du Somaliland comme territoire souverain, a à plusieurs reprises mis en garde l’Éthiopie contre toute ingérence dans les affaires de cette enclave d’un peu plus de 6 millions d’habitants.
Le Somaliland, qui possède sa propre monnaie, n’est pas reconnu par les Nations Unies ni par le reste du monde comme un pays indépendant.
Bien qu’aucune déclaration officielle d’Addis-Abeba n’ait confirmé le renforcement de son consulat à Hargeisa, les intentions de l’Éthiopie à l’égard du Somaliland seront examinées de près et critiquées par la Somalie, qui a rallié le soutien de certains de ses voisins, comme l’Égypte, l’Érythrée et le Soudan.
Certains de ces pays sont en désaccord avec l’Éthiopie en raison de la construction controversée d’un barrage sur le Nil.
Ces dernières années, l’Éthiopie, pays enclavé, n’a pas caché son ambition commerciale d’obtenir un accès illimité aux ports de la région afin de renforcer ses liens commerciaux avec le reste du monde, un accès étouffé depuis l’indépendance de l’Érythrée au début des années 1990.
Sous la direction du Premier ministre Abiy Ahmed, l’Éthiopie s’est engagée à retrouver cet accès pour promouvoir ses intérêts commerciaux.
Un protocole d’accord conclu le 1er janvier 2024 avec le Somaliland visait à corriger cette aberration de longue date en permettant à l’Éthiopie d’accéder à la mer Rouge en échange de la reconnaissance de l’enclave en tant que pays à part entière.
Outre l’accès au golfe d’Aden, l’accord permet également à l’Éthiopie d’établir une base militaire à Lughaya, à l’intérieur du Somaliland.
La Somalie a rapidement dénoncé cet empiètement illégal de l’Éthiopie sur son territoire, qui constitue une violation flagrante du droit international relatif à la souveraineté territoriale.
Le Somaliland, quant à lui, affirme que le protocole d’accord respecte l’intégrité territoriale de toutes les nations concernées et favorise la cohabitation pacifique et la collaboration régionale.
Dans un climat de tension, la Somalie a rappelé son ambassadeur à Addis-Abeba, tandis que l’envoyé de l’Éthiopie quittait Mogadiscio, incitant l’Union africaine à appeler à la retenue.
La plupart des observateurs estiment que, même si ces tensions ne déclencheront pas nécessairement des hostilités ouvertes entre les deux pays, elles risquent de diviser la région de la Corne de l’Afrique et de compromettre les acquis de l’intégration régionale.
Les deux pays ne sont pas en état d’engager des hostilités militaires après des années de conflits internes.
L’armée éthiopienne, épuisée par les combats contre le Front de libération du peuple du Tigré et les insurgés Amhara, pourrait ne pas souhaiter s’engager dans un nouveau conflit.
L’Éthiopie est l’un des cinq pays d’Afrique de l’Est fournissant des troupes à la mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) et son retrait des forces de maintien de la paix est prévu d’ici la fin de l’année.
Le voisin éthiopien, tout aussi las de la guerre, émerge lentement de plus de trois décennies d’instabilité et a sollicité l’implication des Nations Unies pour trouver une solution diplomatique à la crise du Somaliland.
Les observateurs craignent que les grands gagnants de cette crise diplomatique soient les militants d’Al-Shabaab, qui pourraient exploiter la situation pour attiser les tensions et plonger la région dans une plus grande instabilité.
« Toute cette situation entre l’Éthiopie et la Somalie à propos du Somaliland n’est qu’un coup de pied de l’Éthiopie dans la fourmilière avec toutes les conséquences qui pourraient en découler », a estimé un observateur.
MG/as/fss/ac/APA