La ministre bissau-guinéenne de l’Agriculture et du Développement rural, Fatumata Djau Balde, a pris part à la 16ᵉ réunion de l’équipe pluridisciplinaire du Bureau sous-régional de la FAO en Afrique de l’ouest, qui se tient actuellement à Praia, au Cabo Verde. Dans un entretien accordé à APA, elle revient sur les enjeux agricoles de la Guinée-Bissau, les défis liés à la sécurité alimentaire et les expériences inspirantes échangées lors de cette rencontre sous-régionale.
Madame la ministre, vous participez actuellement à la 16ᵉ réunion de l’équipe multidisciplinaire du bureau sous-régional de la FAO à Cabo Verde. Une première réaction par rapport aux travaux auxquels vous avez pris part ?
Merci pour cette opportunité. Ma première impression est que la FAO fait preuve d’un niveau élevé d’organisation. Ce n’est pas seulement ici à Cabo Verde, mais à travers sa stratégie annuelle de réunir tous ses bureaux avec les partenaires concernés. Cela permet de prendre en compte les grandes préoccupations des pays en matière de sécurité alimentaire, de protection sociale et de collaboration avec les ministères de l’Agriculture. Cette synergie permet d’élaborer un programme annuel d’intervention plus efficace.
En Guinée-Bissau, quelles sont les principales préoccupations en matière de protection sociale ?
La Guinée-Bissau est un pays où plus de 80 % de la population dépend de l’agriculture. Ce secteur est non seulement la base, mais l’essence même de notre économie. Notre priorité est d’améliorer la production agricole, notamment celle du riz, qui est au cœur de notre alimentation. Nous avons la capacité de produire du riz trois fois par an grâce à un système d’irrigation efficace, mais le manque de financement demeure un défi majeur.
Le financement semble être un problème récurrent. Quels autres défis avez-vous identifié ?
Le financement est effectivement crucial, mais il y a aussi un manque d’infrastructures de conservation et de transformation des produits agricoles. Par exemple, les femmes, qui sont majoritaires dans l’agriculture, produisent en grande quantité mais ne peuvent tout vendre, faute de systèmes de conservation. Cela mène à des pertes considérables. Par ailleurs, la transformation des produits, comme la noix de cajou, reste limitée. Nous exportons 98 % de ce produit sous forme brute, ce qui réduit sa valeur ajoutée et les opportunités d’emploi local. Enfin, la mécanisation agricole est insuffisante pour répondre à nos ambitions d’augmentation de la production.
Le foncier est également un défi pour les femmes en Afrique de l’Ouest. Comment cela se manifeste-t-il en Guinée-Bissau ?
C’est une réalité. Bien que les lois garantissent l’égalité d’accès à la terre, des défis persistent. Les femmes doivent être mieux informées de leurs droits pour les revendiquer. En Guinée-Bissau, nous avons pris des mesures concrètes. Par exemple, dans les zones où nous travaillons avec des femmes, nous légalisons les terres en leur nom avant tout projet agricole. Cela protège leurs droits et leur permet de pratiquer sereinement leur activité.
Ces initiatives peuvent-elles inspirer d’autres pays de la sous-région ?
Absolument. Notre politique de légalisation des terres pour les femmes est une expérience que nous partageons volontiers. Nous avons également introduit des systèmes solaires pour conserver les produits agricoles sur les marchés et des programmes visant à retenir les jeunes en milieu rural grâce à un soutien financier, logistique et technique. Ces initiatives peuvent être adaptées par d’autres pays.
Avez-vous tiré des enseignements des expériences des autres pays lors de cette réunion ?
Oui. Par exemple, nous avons appris des stratégies d’horticulture en période de pluies, un défi dans notre pays en raison des inondations. Ces pratiques nous inspireront pour améliorer notre propre production.
AC/Sf/APA