Après 16 mois de guerre, la crise humanitaire au Soudan s’aggrave, avec plus de 10,7 millions de personnes déplacées confrontées à des violences sexuelles généralisées et à une famine imminente, alertent les agences de l’Onu.
La guerre qui ravage le Soudan depuis près de 16 mois a plongé le pays dans une crise humanitaire sans précédent. Les équipes de l’Onu sur place dressent un tableau alarmant : violences sexuelles massives contre les femmes et les enfants, risque de famine pour des dizaines de milliers d’enfants, et déplacements de population à grande échelle. Plus de 10,7 millions de personnes sont désormais déplacées à l’intérieur du pays, beaucoup ayant dû fuir plusieurs fois.
Selon James Elder, porte-parole du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef), relayant des témoignages bouleversants recueillis auprès d’un haut responsable médical d’un hôpital près de Khartoum « des centaines de femmes et de filles, certaines âgées de huit ans à peine, ont été violées. Beaucoup ont été retenues captives pendant des semaines. »
Plus inquiétant encore, le médecin de l’hôpital Al Nao à Omdurman a évoqué « le nombre inquiétant de bébés nés après un viol qui sont désormais abandonnés. » Elder souligne que ces cas ne représentent probablement que la partie émergée de l’iceberg, de nombreuses atrocités restant non signalées en raison des difficultés d’accès à certaines zones.
La situation alimentaire est tout aussi préoccupante. Les experts du Comité d’examen de la famine (FRC) ont récemment signalé des conditions de famine dans certaines parties du Nord-Darfour, notamment dans le camp de Zamzam près d’Al Fasher.
Ce camp, qui abrite un demi-million de personnes déplacées, est confronté à une pénurie alimentaire extrême, aggravant la malnutrition et la mortalité. Trois autres zones sont au bord de la famine, signale l’Onu.
James Elder avertit que « si aucune mesure n’est prise, des dizaines de milliers d’enfants soudanais pourraient mourir dans les mois à venir. » Il précise que ce scénario pourrait encore s’aggraver en cas d’épidémies de rougeole, de diarrhée ou d’infections respiratoires, particulièrement probables dans le contexte actuel de fortes pluies et d’inondations.
Déplacements massifs de population
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) rapporte des chiffres stupéfiants concernant les déplacements de population. Plus de 10,7 millions de personnes sont actuellement en quête de sécurité à l’intérieur du pays, beaucoup ayant été déplacées deux fois ou plus. A en croire Mohamed Refaat, chef de mission de l’OIM au Soudan, « c’est presque toute la population de la capitale du pays qui a été déplacée. »
Les combats dans l’État de Sennar ont à eux seuls déplacé plus de 700 000 personnes le mois dernier. Presque tous les déplacés (97 %) se trouvent dans des localités où l’insécurité alimentaire est aiguë, voire pire, relève l’OIM.
Les agences humanitaires font face à d’importants obstacles pour accéder aux populations les plus vulnérables. Mohamed Refaat décrit une situation où de nombreux civils restent « piégés » dans un « environnement de guerre très hostile », sans accès aux services de santé.
Beaucoup sont contraints de parcourir de longues distances à pied pour tenter de se procurer de la nourriture, dans un contexte de flambée des prix. « Il y a une pénurie de tout », explique-t-il, ajoutant que des milices ont pris le contrôle de divers endroits, limitant les déplacements des non-combattants.
ARD/te/Sf/APA