António Guterres, le Secrétaire Général de l’Organisation des nations unies (Onu), a adressé au Conseil de sécurité un rapport daté du 3 octobre dernier sur la situation au Mali.
La communauté internationale suit de près le Mali dirigé par une junte et confronté à la menace jihadiste. Quatre mois après la publication du précédent rapport, le récent passe en revue les faits nouveaux survenus au Mali durant cette période, avant d’en faire l’analyse.
Dans le document de 21 pages, António Guterres, le Secrétaire Général des Nations Unies, soutient que « le Mali fait encore face à des défis colossaux, mais les derniers mois ont été marqués par certains progrès ».
À l’avenir, selon celui qui a pris ses fonctions le 1er janvier 2017, il est essentiel de tirer parti de ces avancées, l’objectif ultime étant de mettre le pays sur une voie irréversible vers la paix, la sécurité et la stabilité durables auxquelles sa population aspire depuis longtemps.
Constatant que l’accord entre le Mali et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) sur le calendrier de la transition et le mécanisme de suivi correspondant a « ouvert la voie à la levée des sanctions financières et économiques », M. Guterres a félicité « les dirigeants régionaux pour leur engagement sans faille ».
L’ancien Premier ministre du Portugal (1995 à 2002), à propos du processus de retour à l’ordre constitutionnel, a salué l’adoption et la promulgation de la Loi électorale, l’entrée en service de l’organe indépendant unique de gestion des élections et la formulation d’une nouvelle Constitution. Tout cela, a-t-il affirmé, témoigne d’un nouvel élan qu’il convient de soutenir au regard des tâches à accomplir.
Persuadé que l’un des éléments clés « de la réussite des processus électoraux et des réformes tient à l’ampleur du consensus qui les entoure », António Guterres se dit encouragé « par le fait que les autorités (maliennes) aient relancé le cadre consultatif avec les partis politiques et les acteurs de la société civile, ainsi que par l’approche inclusive qui a sous-tendu l’adoption de la Loi électorale ».
Parallèlement à la lutte armée, le Mali explore également la voie du dialogue. À cet effet, souligne le successeur de Ban Ki-Moon, la tenue, en août, de la réunion de décision de haut niveau sur certains aspects de l’Accord de paix a ravivé les espoirs de progrès décisifs dans cette entreprise critique de désarmement, démobilisation et de réintégration.
Etant donné que l’Accord de paix reste le meilleur cadre pour surmonter les conflits récurrents dans le Nord du Mali, en plus d’être une composante essentielle du programme de réforme conçu par les Assises nationales de la refondation du pays, António Guterres a plaidé pour l’accélération, par le gouvernement et les mouvements signataires, « des travaux de la Commission ad hoc chargée de formuler des recommandations sur l’intégration des hauts responsables des mouvements, y compris en ce qui concerne la chaîne de commandement ».
« La Minusma continuera à soutenir le processus de paix »
À en croire le Secrétaire Général des Nations Unies, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), dont le mandat a été prolongé d’un an, le 30 juin dernier, « continuera à soutenir le processus de paix, notamment dans le cadre de la médiation internationale ».
Poursuivant, il a magnifié les résultats de la session du Comité de suivi de l’Accord qui vient de se tenir. « Le plein fonctionnement de ce Comité et de ses structures subsidiaires est indispensable pour garantir un suivi étroit du processus de paix, le Comité offrant aux parties une tribune pour exprimer leurs préoccupations afin de parvenir à des solutions consensuelles », a fait savoir M. Guterres.
Sur le théâtre des opérations, cet ex-Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (2005-2015), dit rester profondément préoccupé par l’évolution des conditions de sécurité dans le contexte de la reconfiguration de l’action antiterroriste internationale au Sahel : « La poursuite des activités terroristes dans le centre du Mali et dans la zone tri-frontalière entre le Mali, le Burkina et le Niger, en particulier dans les régions de Ménaka et de Gao, y compris la concurrence accrue entre groupes terroristes, a fait un nombre considérable de victimes civiles, provoqué des déplacements de population et perturbé les moyens de subsistance de communautés déjà vulnérables ».
Dans ce contexte, le Mali a intensifié ses efforts pour lutter contre l’insécurité, mais « une paix durable ne peut être atteinte que si les opérations de sécurité s’accompagnent d’efforts tout aussi résolus pour instaurer la présence de l’État, y compris un appareil judiciaire considéré comme équitable et efficace, pour assurer la prestation des services de base, pour promouvoir la réconciliation intra et intercommunautaire et pour protéger les droits humains », a expliqué l’ancien président du Conseil européen.
Par conséquent, il a apprécié les mesures prises par le gouvernement malien en vue du redéploiement du personnel de l’administration civile et pour l’adoption de sa stratégie de stabilisation et de son plan d’action pour les régions du Centre.
La Minusma et l’équipe de pays des Nations Unies, a promis António Guterres, travailleront en étroite collaboration avec les autorités pour appuyer ces mesures et la Mission continuera à soutenir l’action des Forces de défense et de sécurité maliennes en pleine conformité avec la politique de diligence voulue en matière de droits humains.
« J’exhorte les autorités maliennes à redoubler d’efforts »
Les Nations Unies accordent une importance particulière au respect des droits humains en toutes circonstances. À ce sujet, son Secrétaire Général a rappelé que les opérations militaires, y compris celles menées avec des partenaires bilatéraux, doivent être menées dans le respect du droit international des droits de l’Homme et du droit international humanitaire, et les auteurs de violations et d’atteintes doivent être amenés à répondre de leurs actes.
Globalement, aux yeux de la communauté internationale, si la note trimestrielle récemment publiée par la Minusma fait état d’une baisse du nombre de violations et d’atteintes recensées, la situation générale n’en reste pas moins fort préoccupante.
Partant de là, M. Guterres a exhorté « les autorités maliennes à redoubler d’efforts pour honorer leur engagement de respecter leurs obligations internationales », non sans dire que « la Minusma continuera à soutenir le gouvernement et poursuivra son dialogue constructif avec lui ».
Le conflit détériore sérieusement la situation humanitaire au Mali et dans les autres pays du Sahel concernés par la menace jihadiste. Face à l’urgence, a estimé l’ancien président de l’Internationale socialiste, une mobilisation internationale, bien supérieure à celle qui existe jusqu’à présent, s’impose.
« Le plan de réponse humanitaire n’étant financé qu’à hauteur de 27 %, j’appelle la communauté internationale à se mobiliser pour répondre aux besoins cernés. Plus généralement, un soutien international est requis pour l’exécution des différents processus en cours au Mali. Aussi centrales soient-elles, les initiatives maliennes ne peuvent réussir sans un accompagnement à la hauteur des tâches à accomplir », a-t-il ajouté dans ce sens.
Les progrès réalisés au Mali, a prévenu António Guterres, contribueront considérablement à stabiliser la région du Sahel. En revanche, tout échec dans la stabilisation du pays se répercuterait bien au-delà de ses frontières. C’est pourquoi, a-t-il indiqué, « j’encourage toute action visant à renforcer la confiance et la coopération entre le Mali et ses voisins et partenaires internationaux » et « demande à nouveau la libération des 46 soldats ivoiriens encore détenus au Mali ».
En outre, le Secrétaire Général des Nations Unies a déclaré que l’efficacité de la Minusma est étroitement liée au niveau de facilitation dont elle bénéficie de la part des autorités en termes de liberté de mouvement et d’autres activités connexes, conformément à l’accord sur le statut des forces.
Au cours des derniers mois, « les entraves aux opérations de la Minusma ont eu une sérieuse incidence sur sa capacité à s’acquitter de son mandat, en particulier la protection des civils », a regretté le natif de Lisbonne (Portugal), qui a invité « les autorités maliennes à soutenir pleinement la Mission dans toutes ses activités visant à les aider à instaurer la paix et la stabilité dans le pays ».
De l’avis d’António Guterres, il est urgent de doter la Minusma des moyens dont elle a besoin, compte tenu de son environnement opérationnel difficile, en particulier de la menace asymétrique à laquelle elle doit faire face. Aussi, au vu de l’évolution des conditions de sécurité, il importe d’envisager les mesures appropriées, y compris un accroissement de la force à court terme, conformément à ce qui a déjà été convenu avec les autorités maliennes, en attendant les conclusions de l’examen interne de la Mission.
ID/APA