Les autorités sénégalaises ont créé trois nouvelles Zones économiques spéciales situées dans le triangle Dakar-Thiès-Mbour (Ouest).
Au Sénégal, le gouvernement a misé sur les Zones économiques spéciales (ZES) pour attirer l’investissement privé et renforcer la compétitivité des entreprises. Mais dans la mise en œuvre de ces espaces aménagés pour la production de biens et services et régis par des lois économiques, les intérêts des populations vivant dans leur lieu d’installation ne sont pas pris en compte. C’est ce que révèle une étude du Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (CRAFS), une plateforme de la société civile œuvrant pour une gouvernance foncière inclusive, transparente et équitable.
« Les processus de mise en œuvre des ZES ne tiennent pas compte des intérêts et des préoccupations des communautés locales surtout en zones rurales au regard des activités dans les sones d’installation. Les activités promues par les ZES se substituent aux activités rurales sans pour autant proposer des alternatives aux communautés. Les seules options proposées se résument parfois à la possibilité d’obtenir des emplois salariés souvent très précaires avec des revenus faibles dans les entreprises installées », révèle l’étude.
Elle est menée par Enda Pronat, avec des chercheurs de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, de l’École nationale supérieure d’agriculture de Thiès (ENSA) et de l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA), dans les ZES de Sandiara, Diass et Diamniadio créées en 2017.
Les chercheurs notent un manque d’identification exhaustive des acteurs impactés par la création des ZES. Or, indiquent-ils, ce manque de recensement devrait servir de base à un système d’indemnisation faisant l’objet d’un consensus et prenant en compte, non pas ce que prévoit la loi actuelle, mais la perte des moyens d’existence.
« Les populations ayant perdu leurs terres n’ont pas accès à des emplois sécurisés durables et assez rémunérateurs pour assurer à ces familles des revenus permettant de vivre décemment », poursuit l’étude, notant que les entreprises installées sont handicapées par certaines lourdeurs administratives avec l’absence de guichet unique qui constitue pourtant un des arguments phares de marketing des promoteurs des sites des trois ZES étudiées.
Pour mettre fin à tous ces obstacles, il est recommandé de mettre en cohérence le plan national d’implantation des Zones économiques spéciales (ZES) et les plans nationaux d’aménagement du territoire, et mieux insérer la politique des ZES dans les dynamiques territoriales.
Pour les chercheurs, il faut aussi impliquer les collectivités territoriales et les communautés dans tout le processus de mise en place et de gestion des ZES, adapter des modèles gagnant-gagnant entre les populations locales et les investisseurs, accorder la priorité d’embauche aux populations des localités d’accueil, et prévoir pour les communautés locales un dispositif d’accompagnement et d’allègement des conditions d’accès aux ZES.
TE/APA