Trois ans après les premières victimes de la « répression des manifestations politiques », le collectif CartograFreeSenegal publie un bilan de 65 décès, principalement causés par des balles.
Élève âgé de 20 ans à Bignona, au sud du Sénégal, Cheikh Coly tombait en mars 2021 sous une balle en plein cœur, devenant la première victime de la séquence de répression politique la plus meurtrière connue par le Sénégal depuis 60 ans. Les manifestations étaient déclenchées en soutien à l’actuel Premier ministre, Ousmane Sonko, qui était alors l’opposant numéro un du régime de Macky Sall (2012-2024) et originaire du sud du pays.
Au cours des trois années suivantes, 64 autres personnes ont été tuées, dont 51 par balles, a indiqué mardi le collectif CartograFreeSenegal dans un rapport où il met en lumière les visages de ces victimes trop souvent réduites à des chiffres. Les nouvelles autorités issues de l’opposition d’alors indiquent pour leur part un bilan de 79 à 81 morts, le ministère en charge de la Famille et des Solidarités ayant déjà commencé à envoyer des montants d’argent pour indemniser les familles des victimes.
Mais « derrière chaque statistique se cachent une vie arrachée, des proches affligés, des communautés endeuillées et un impérieux besoin de justice », a souligné CartograFreeSenegal, un collectif composé d’une quarantaine de journalistes, cartographes et scientifiques des données. Il s’est réuni après le soulèvement populaire de juin 2023 pour établir un décompte précis et authentifié des victimes dont 81% ont été tuées par balles.
Durant ces trois années, la violence était particulièrement marquée dans les régions de Dakar et Ziguinchor (sud), dénombrant respectivement 40 et 19 morts. Ces chiffres reflètent « l’ampleur de la violence déployée contre les citoyens en quête de justice », ajoute le rapport.
Les victimes sont majoritairement jeunes, avec un âge moyen de 26 ans. Le plus jeune avait 14 ans, et la plus âgée 53 ans. Près de la moitié d’entre elles étaient des ouvriers ou des mécaniciens, et un quart étaient des élèves ou des étudiants, ce qui témoigne de l’ampleur de l’impact de la répression sur toutes les couches de la société.
« Nous avons établi un lien direct et sûr avec les familles des victimes pour authentifier chaque décès. Chaque cas a été minutieusement documenté, à travers des certificats d’autopsie, des photos et vidéos, ainsi que des témoignages de proches et témoins oculaires », a indiqué le collectif CartograFreeSenegal, affirmant qu’il se tient aux côtés des familles endeuillées qui attendent toujours justice.
ODL/te/Sf/APA