Les pays de la région s’opposeront à toute politique visant à leur priver du recours aux énergies fossiles contenues dans leur sous-sol, a averti le président nigérien, Mohamed Bazoum.
Les énergies fossiles ont de beaux jours devant elles sur le continent noir. Au moment où foisonnent un peu partout à travers le monde des initiatives pour une transition énergétique voire climatique plus juste, le président nigérien, Mohamed Bazoum, a fait savoir que le Sahel auquel son pays appartient n’est pas prêt à se priver du pétrole pour soutenir son développement.
S’exprimant jeudi à Paris à l’ouverture du sommet pour un Nouveau pacte financier mondial, il a rappelé que cette partie de l’Afrique fait partie des zones les plus perturbées par les effets du changement climatique. Mais, a-t-il alerté, « il faut particulièrement prendre garde à ce qu’elle ne soit victime des programmes conçus dans le cadre de la transition climatique ».
« Notre débat sur ces questions est un débat qui reste polémique. C’est à ce titre que, comme tous les autres pays pauvres, nous serons opposés à toute politique visant à nous priver du recours aux énergies fossiles contenues dans notre sous-sol », a averti le chef de l’Etat nigérien.
Le Niger est un producteur de longues dates de pétrole. Ces dernières années, plusieurs autres pays africains ont découvert d’importantes ressources pétrolières et gazières. Inviter ces derniers à s’en passer au profit des énergies renouvelables semble être une mission impossible. Cela, d’autant plus qu’ils ne sont pas les plus gros pollueurs du monde et que les pays développés ont atteint leur niveau actuel grâce à l’usage massif de l’or noir.
Face à ce dilemme, « l’unique solution acceptable est celle qui permet d’atteindre les objectifs des différents agendas à la fois, se fondant par conséquent sur la solidarité et la complémentarité bien comprises, rendues effectives par une politique de péréquation généralisée », a estimé M. Bazoum.
Il a ainsi suggéré la construction d’une boîte à outils audacieuse et innovante en termes règlementaires juridiques et en ingénierie financière pour faciliter la mise en œuvre du nouveau pacte.
« Dans cette boîte à outils, les instruments financiers existants doivent être améliorés, d’autres créés pour mieux partager les risques et les résultats en tenant compte des facteurs et des contraintes climatiques et environnementales, ainsi que d’autres externalités dans la valorisation et la couverture des risques. Elle comprendra en particulier, la monétisation des quotas carbone et des DTS. Plus spécifiquement, le nouveau pacte doit rendre concrète et opérationnelle l’aide prévue par les Accords de Paris et de Glasgow en faveur des pays pauvres, qui attendent d’être mis en application », a-t-il précisé.
Ce nouveau sommet convoqué par l’Élysée ambitionne d’entamer la refonte du système financier international, rendu obsolète par la multiplication des crises. Le successeur de Mahamadou Issoufou souhaite ainsi voir de nouveaux instruments de garantie des financements et une réduction des primes de risques excessives des investisseurs. Cela permettrait, d’après lui, d’intéresser le secteur privé à ce combat contre le changement climatique dans les pays pauvres.
« Les coûts prohibitifs des capitaux les ont jusqu’ici mis hors de notre portée, malgré les recommandations formulées à l’occasion de toutes les rencontres que nous tenons. Or ces coûts sont paradoxalement en forte augmentation et ne reflètent pas souvent les fondamentaux macroéconomiques de nos pays. Il y a, même pour ce sommet, […], de grands risques que nous continuions dans les incantations. Or, je pense que nous avons déjà organisé trop de rencontres pour que nous puissions indéfiniment répéter les mêmes choses. Il s’agit donc de passer à l’action », a-t-il plaidé.
Pour M. Bazoum, cette rencontre de Paris doit aboutir à un système plus juste et plus résilient pour éviter le chapelet des crises décennales et la succession des réformes « définitives » censées les résoudre depuis plus d’un siècle.
A cette fin, et pour susciter l’adhésion, a-t-il souligné, une conception collaborative et inclusive des parties prenantes, publiques et privées, permettra de fixer par itérations les termes du pacte de manière juste et robuste.
ARD/ac/APA