La Banque africaine de développement (Bad) table maintenant sur 3,4 % de croissance en 2023 et 3,8 % en 2024 contre 4,0 % et 4,3 % précédemment anticipés.
Dans un contexte de chocs mondiaux, les économies du continent noir sont impactées. C’est pourquoi la Banque africaine de développement (Bad) a révisé ses prévisions macroéconomiques pour l’année finissante et celle à venir : 3,4 au lieu de 4,0 % en 2023 et 3,8 et non 4,3 % en 2024.
« Ces prévisions, légèrement inférieures, s’expliquent par les effets persistants et à long terme de la pandémie de Covid-19, des tensions et conflits géopolitiques, des chocs climatiques, un ralentissement économique mondial, ainsi que la marge de manœuvre budgétaire limitée dont disposent les gouvernements africains pour répondre de manière adéquate aux chocs et soutenir les gains de la reprise économique après la crise sanitaire », a argumenté l’institution financière.
Les nouvelles données, a précisé la Bad dans un communiqué reçu à APA, ont été publiées dans la mise à jour du rapport sur les « Performances et perspectives macroéconomiques de l’Afrique 2023 » (MEO) qui fait suite au rapport « Perspectives économiques 2023 en Afrique » divulgué en mai dernier.
« L’environnement économique mondial difficile et les multiples chocs continuent de façonner la performance macroéconomique de l’Afrique. Les pressions inflationnistes persistantes menacent d’anéantir tous les gains macroéconomiques réalisés depuis l’atténuation des risques de pandémie, tandis que la dépréciation continue des monnaies nationales dans de nombreux pays a exacerbé le coût du service de la dette », a déclaré Kevin Urama, économiste en chef et vice-président du Groupe de la Banque africaine de développement.
Mais face aux chocs régionaux et mondiaux, l’institution financière continentale « reste déterminée à aider les pays africains à mieux relever ces défis et à remettre la croissance économique sur les rails », a assuré M. Urama.
Sur le court terme, la mise à jour du MEO exhorte les pays africains à poursuivre la mise en œuvre des politiques monétaires restrictives pour contenir l’inflation. Cela devrait être soutenu par des politiques budgétaires qui favorisent la diversification économique et éliminent les contraintes liées à l’offre.
Le nouveau référentiel, à moyen et long terme, appelle les gouvernements à intensifier les investissements efficaces dans le capital humain et les infrastructures physiques afin de stimuler la productivité, de relancer la croissance économique et de créer des opportunités pour un développement plus inclusif et durable.
Pressions inflationnistes
Si elles s’atténuent au niveau mondial, a constaté la Bad, les pressions inflationnistes persistent en Afrique et continuent de peser lourdement sur les performances économiques à court et moyen terme des pays du continent. L’inflation en Afrique devrait atteindre en moyenne 18,5 % cette année et 17,1 % en 2024. Selon le MEO révisé, cela représente une accélération de 3,4 et 7,6 points de pourcentage, respectivement, par rapport aux projections antérieures.
« Les pressions inflationnistes persistantes ont été largement alimentées par les perturbations des approvisionnements dans le secteur agricole, une inflation plus forte des importations en raison de l’affaiblissement des monnaies locales, les prix relativement élevés des produits de base et la persistance de la prédominance budgétaire dans plusieurs pays d’Afrique », a souligné le communiqué. Cette augmentation des pressions liées au coût de la vie a érodé le pouvoir d’achat des Africains, alimentant le risque de nouvelles hausses de l’incidence de la pauvreté.
En outre, le rapport a noté que la lenteur de la croissance économique mondiale influe sur la demande d’exportations africaines. Une tendance qui devrait se maintenir beaucoup plus longtemps. Le ralentissement économique prévu dans les économies avancées et la croissance atone de la Chine par rapport aux tendances historiques ont pesé sur la croissance mondiale.
« Cela a exercé une pression supplémentaire sur les pays africains, en particulier sur ceux qui dépendent du marché chinois pour leurs exportations de matières premières. Un soutien renforcé des politiques en Chine pourrait favoriser la reprise économique mondiale et déclencher des retombées positives sur les pays africains pour lesquels la Chine demeure un partenaire commercial majeur. Ces facteurs peuvent contribuer à atténuer les risques défavorables qui pèsent sur les perspectives économiques », a indiqué la Bad.
D’après la mise à jour des « Performances et perspectives macroéconomiques de l’Afrique 2023 », les chocs climatiques, associés à l’aggravation des tensions géopolitiques au Moyen-Orient et à la prolongation de la guerre de la Russie en Ukraine, pourraient entraîner de plus grandes perturbations dans le commerce mondial et les flux d’investissement étrangers. Une perspective qui pourrait déclencher une nouvelle série de resserrements prolongés des conditions financières mondiales et, par ricochet, exercer une pression supplémentaire sur la dépréciation des monnaies nationales, augmenter les coûts du service de la dette et exacerber les pénuries de financement du continent.
Rester à flot malgré tout
Pour y arriver, la Banque africaine de développement a affirmé que « des politiques monétaires et budgétaires coordonnées, étayées par une réduction de la prédominance budgétaire, seront essentielles à la reconstitution des amortisseurs contre les chocs ».
L’institution financière a aussi estimé que des investissements ciblés et séquencés pour faire face aux contraintes en matière d’approvisionnement, notamment en remédiant aux faiblesses structurelles, contribueraient à inverser le ralentissement de la dynamique de reprise économique et à placer les économies africaines sur une trajectoire de croissance plus élevée et durable.
Son rapport exhorte les pays africains, « afin de réduire les pressions inflationnistes durablement, à éliminer les obstacles qui empêchent l’offre intérieure de réagir à la hausse des prix internationaux des matières premières, et à stimuler la productivité du travail grâce à des investissements ciblés dans les infrastructures et le capital humain », mais invite également à « s’attaquer aux obstacles qui entravent la mobilisation accrue des ressources intérieures pour remédier à la pénurie actuelle de financement ».
Lancé en janvier 2023, le rapport sur les « Performances et perspectives macroéconomiques de l’Afrique » complète le rapport annuel sur les « Perspectives économiques en Afrique » de la Bad, qui se concentre sur les questions politiques émergentes clés et pertinentes pour le développement du continent. Le MEO est publié au premier et troisième trimestre de chaque année.
ID/ac/APA