L’impact des violences actuelles entre les militaires rivaux au Soudan menace de faire dérailler les progrès politiques bilatéraux avec le Soudan du Sud voisin, d’aggraver la situation humanitaire fragile et de poser de nouveaux risques, ont averti mardi de hauts responsables de l’Onu au Conseil de sécurité.
« La flambée de violence au Soudan pourrait compromettre gravement les chances de progrès politique à Abiyé et les questions frontalières », a alerté, au Conseil de sécurité des Nations unies, Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale pour l’Afrique au département des affaires politiques et de la consolidation de la paix et au département des opérations de maintien de la paix.
La sécurité à Abiyé, une région frontalière contestée riche en pétrole et à cheval sur les deux pays africains, a été un point de discorde, mais des accords ont été conclus avant l’explosion de violence au Soudan le 15 avril, a-t-elle rappelé, fournissant des mises à jour du dernier rapport du Secrétaire général des Nations unies sur l’évolution de la situation.
Des déploiements perturbés
Parmi les préoccupations les plus pressantes figurent les perturbations causées par le conflit sur les itinéraires de déploiement de la Force intérimaire de sécurité des Nations unies pour Abiyé (UNISFA), mandatée par le Conseil, établie en 2011 pour mettre en œuvre les accords frontaliers bilatéraux, et que Mme Pobee dirige également.
« Alors que les combats se poursuivent et que des efforts de médiation sont en cours, les Nations Unies continueront à soutenir le Soudan et le Sud-Soudan lorsque le dialogue sur Abiyé reprendra », a-t-elle assuré.
« L’arrivée de personnel et d’équipement supplémentaires devra être reportée, ce qui pourrait affecter la capacité de la force », a-t-elle indiqué, ajoutant qu’une planification est actuellement en cours pour rendre des dispositions alternatives qui minimisent le retard tout en sauvegardant la sécurité du personnel et de l’équipement.
Progrès réalisés
Avant la crise, les équipes de pays des Nations Unies au Soudan et au Soudan du Sud, avec l’UNISFA, avaient finalisé les arrangements administratifs pour le programme conjoint d’Abiyé et avaient commencé à mettre en œuvre des projets visant à créer un environnement propice à la coexistence pacifique, y compris un centre de nutrition pour les femmes et les enfants et une formation professionnelle pour les jeunes.
« L’UNISFA surveille l’impact potentiel des combats au Soudan, comme l’afflux de personnes déplacées, l’entrée de groupes armés dans la région ou l’arrivée des fauteurs de troubles dans les relations intercommunautaires locales », a-t-elle souligné, notant que des évacuations ont eu lieu.
« Bien qu’aucun de ces risques ne se soit matérialisé de manière importante jusqu’à présent, la Mission reste attentive à leur éventualité », a ajouté Mme Pobee.
Juba s’inquiète
Hann Serwaa Tetteh, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Corne de l’Afrique, a déclaré au Conseil que le conflit mettait en péril les relations stables qui existaient avant le conflit entre Juba, la capitale du Soudan du Sud, et Khartoum.
« Les conséquences humanitaires, sécuritaires, économiques et politiques de l’évolution de la situation au Soudan ont suscité l’inquiétude des dirigeants politiques du Sud-Soudan », a-t-elle poursuivi.
Des milliers de Sud-Soudanais accueillis au Soudan sont en train de rentrer, avec un potentiel de 200.000 autres personnes fuyant la violence « si nous ne voyons pas la stabilité revenir rapidement », a-t-elle prévenu. Cela constituerait un défi pour le Soudan du Sud dont les deux tiers de la population ont besoin d’une aide humanitaire.
Risques liés à la sécurité des frontières
Le Soudan n’étant pas actuellement en mesure de protéger efficacement ses frontières, la commissaire s’inquiète en outre d’une éventuelle recrudescence des mouvements transfrontaliers de groupes armés et criminels.
Par ailleurs, les combats au Soudan ont déjà interrompu les livraisons de biens essentiels et de nourriture et pourraient menacer les exportations de pétrole du Soudan du Sud, a-t-elle averti.
« La priorité actuelle est d’arrêter les combats et d’entamer des négociations constructives qui, espérons le, aboutiront à un cessez-le-feu permanent », a-t-elle préconisé, soulignant que son Bureau continuerait à dialoguer avec le Soudan et le Sud-Soudan en vue de résoudre les questions en suspens.
WN/fss/ac/APA