Guinée – Justice – Société – Drame
Selon l’Organisation des Nations-Unies (ONU), près de 200 personnes sont mortes dans les manifestations du 28 septembre 2009 alors qu’une centaine de femmes ont été victimes de viols.
APA-Conakry (Guinée) Par Aboubacar Siddy Diallo
Après le défilé des onze accusés du massacre du 28 septembre 2009, place à la partie civile. Frère ainé d’un jeune de 28 ans mort dans ces évènements tragiques, l’avocat Me Oury Bailo Bah a ouvert le bal mardi 14 février.
Décrivant les circonstances de la mort de son jeune frère El Hadj Hassane Bah dont le corps n’a pas été retrouvé, le plaignant a affirmé que ce dernier était sorti le 28 septembre pour assister à une cérémonie familiale.
Selon la déposition de Me Bah, c’est en cours de route que son frère a rejoint les manifestants. Il affirme avoir été au contact avec lui au téléphone, bien avant l’entrée des manifestants au stade du 28 septembre de Conakry. « Aux environs de 11 heures, il m’appelle pour me dire que les bérets rouges sont entrés dans le stade et qu’ils avaient commencé à tirer. Plus tard, je l’ai appelé, le téléphone sonnait, mais personne ne décrochait », se rappelle-t-il. Ce n’est que vers 18 heures que la mort de son frère lui est rapportée.
Si la mort de son frère est un drame pour lui et sa famille, la disparition de son corps est un autre supplice pour eux. « On a perdu un frère, mais on n’a pas retrouvé son corps. Nous n’arrivons pas à faire le deuil. Je voudrais qu’on nous dise où est mon frère El Hadji Hassane Bah », supplie-t-il, près de 14 ans après.
A la suite de cette tuerie de masse, plusieurs témoignages ont indexé l’ancien ministre de la Santé, le colonel Abdoulaye Chérif Diaby d’avoir empêché les familles des victimes d’accéder aux dépouilles de leurs proches.
Dans son témoignage, Me Oumar Bailo Bah a déclaré que l’ancien ministre ne leur a pas facilité la tâche. Répondant à une question de la défense, il a affirmé s’être heurté au refus catégoriques des gestionnaires de la morgue de l’hôpital de Donka alors qu’il était à la recherche du corps de son frère. L’instruction aurait été donnée par le colonel Diaby. « Le ministre de la santé est venu avec des hommes à la morgue. Ils ont chassé les gens qui venaient rechercher des proches. Mais quand ils sont arrivés là-bas c’était la débandade. J’ai vu que c’est suite à son ordre qu’il y a eu ce refus aux parents d’accéder aux corps. L’ordre a été donné aux militaires de chasser tout le monde. Je ne l’ai pas vu injurier », ajoute Oury Bailo Bah.
Au terme des débats au cours desquels toutes les parties au procès ont posé des questions au témoin, le président a renvoyé l’audience au mercredi 15 février.
Selon une enquête indépendante des Nations-Unies, les manifestations du 28 septembre 2009, faisant suite à l’ambition prêtée au chef de la junte d’alors, Moussa Dadis Camara de briguer le suffrage des Guinéens au terme de la transition, ont fait 157 morts et une centaine de femmes violées.
En plus de Dadis Camara et de son ancien aide de camp, Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba, neuf autres accusés sont poursuivis dans cette affaire pour « meurtre, assassinat, viols, pillages, incendies volontaires, vol à main armée, coups et blessures volontaires, torture, enlèvement et séquestration, violence sexuelle, attentat à la pudeur ». Des accusations qu’ils ont rejetées lors de leurs passages respectifs à la barre.
ASD/ac/APA