Pour ses cent jours au pouvoir, Bassirou Diomaye Faye a fait face à la presse nationale par soucis de « redevabilité ». Il assure que le travail de la justice sera poursuivi sur la base des rapports concernant les deniers publics, le foncier et les violences préélectorales.
Au Sénégal, les trois premiers mois ont été ardus pour le nouveau régime du président Bassirou Diomaye Faye. Il a déclaré, samedi, face à la presse sénégalaise, que « les indicateurs économiques étaient au rouge » à son arrivée, n’ayant même pas trouvé d’argent dans la « caisse noire ».
Ces fonds politiques évalués, à des milliards de francs CFA, sont annuellement alloués au président de la République et laissés à sa discrétion, laissant penser que son prédécesseur, Macky Sall (2012-2024), les a dépassés en l’espace de trois mois.
Toutefois, le président Faye estime que son gouvernement a su se serrer la ceinture pour honorer ses premiers engagements vis-à-vis de la population, à travers notamment la baisse des produits de consommation. A titre d’exemple, il indique que des coupures de courant guettaient le Sénégal parce que l’Etat n’avait pas payé des fournisseurs d’hydrocarbures. Il fallait donc trouver des mécanismes pour convaincre ces partenaires.
« Nous sommes passés par un exercice de réallocation des ressources financières entre les besoins prioritaires et ceux moins prioritaires pour pouvoir réduire les denrées de consommation courante », a noté l’inspecteur des impôts de formation devant six journalistes de la presse publique et privée du pays.
« Bien avant ma prise de fonction, il fallait engager des actions urgentes pour stabiliser la fourniture des hydrocarbures, bloquer la signature de certains contrats qui impacteraient nos finances publiques », a-t-il rappelé avant de prévenir qu’il ne « mettrai pas de coude » sur les rapports des corps de contrôle des fonds publics comme son prédécesseur.
Il a annoncé, du bout des lèvres, un remue-ménage « dans les prochaines semaines » au sein de certains postes clés de la justice pilotés par des magistrats. L’objectif est de lancer des poursuites pour une reddition des comptes jugée « très tardive » par beaucoup de Sénégalais alors que le Président Faye indique qu’il entend travailler « sans pression ».
Même s’il écarte « tout esprit de vengeance », il note que justice se fera sur les détournements de deniers publics, l’accaparement de surfaces foncières ou la question des personnes tuées lors des violentes manifestations précédant l’arrivée de son parti, Pastef, au pouvoir.
Sur son compagnonnage avec le leader de ce parti, Ousmane Sonko, le chef de l’Etat se réjouit d’avoir nommé « un excellent Premier ministre » qu’il a tenté d’abord de faire élire à la tête de l’Etat avant que ce dernier ne porte son choix sur lui, après que le Conseil constitutionnel a jugé sa candidature invalide. Face aux détracteurs qui prédisent un nuage dans leurs relations, il répond que cela n’arrivera point, recommandant même à Sonko à « non pas lorgner le fauteuil présidentiel, mais à le regarder et le fixer ».
« Je ne crains pas qu’il me fasse de l’ombre parce que j’ai longtemps été sous son ombre », a insisté le président sénégalais de 44 ans, promettant de rééditer ce genre de rencontre avec les médias sénégalais. « Cet exercice est plus une volonté de redevabilité plutôt qu’un souhait de tirer un bilan. Après trois mois d’exercice, j’ai jugé opportun de parler aux Sénégalais en invitant la presse nationale » alors que des médias étrangers avaient sollicité en vain cette primeur, a-t-il souligné.
ODL/ac/Sf/APA