Le Fonds monétaire international (FMI) a confirmé les conclusions du rapport de la Cour des comptes sur la dette « cachée » du Sénégal, soulignant des sous-estimations volontaires, tout en exigeant des réformes avant de tout nouveau prêt à ce pays ouest-africain, a appris mardi APA.
« Il y a eu une décision très consciente de sous-estimer le stock de la dette » au cours des cinq dernières années au Sénégal, a affirmé Eddy Gemayel, à la tête de la mission du Fonds monétaire international (FMI). « Nous sommes donc d’accord avec la conclusion du rapport de la Cour des comptes », a-t-il ajouté dans un entretien avec RFI.
Ce montant, délibérément « caché », s’élève à environ sept milliards de dollars, selon l’institution financière. Il correspond à la différence entre les deux estimations de la dette publique : celle déclarée sous l’administration de Macky Sall, qui représente plus de 70 % du produit intérieur brut (PIB) et celle calculée par la Cour des Comptes, qui approche les 100 % du PIB.
Suite à la publication de ce rapport qui porte sur l’audit des finances publiques du pays entre 2019 et mars 2024, plusieurs opposants au nouveau régime ont vivement contesté l’étude, la qualifiant de fausse et affirmant qu’elle avait été commandée par le Premier ministre Ousmane Sonko pour discréditer la gestion de l’ex-régime de Macky Sall.
« Le rapport de la Cour des comptes est très clair, il y a eu une décision consciente de sous-estimer le stock de la dette pendant les années précédentes », a martelé Gemayel, avant de préciser que cette sous-estimation s’élève à environ 6 à 7 milliards de dollars, soit 25 % du PIB du pays.
« Il y a une sous-estimation. On a une partie de la dette qui a été caché et ceci a permis aux autorités de pouvoir s’endetter plus sur les marchés, de donner un signal plus positif aux marchés financiers et aussi de pouvoir s’endetter à des taux plus favorables que ce que ces taux auraient été si la dette était plus élevée », a poursuivi le chef de la délégation du FMI, saluant l’effort de transparence des nouvelles autorités sénégalaises. « La démarche de transparence est bien perçue », a-t-il souligné dans un entretien avec Le Soleil.
Cependant, le FMI a refroidi les attentes du Sénégal en matière de crédit, selon Walf Quotidien. Le pays espérait obtenir un prêt de 1,8 milliard d’euros, soit plus de 1000 milliards de francs CFA, à l’occasion de cette visite, après la publication du rapport de la Cour des comptes. Toutefois, Gemayel a insisté sur la nécessité de prendre des mesures correctrices concernant les « fausses informations » sur la dette avant tout déblocage de fonds.
Par ailleurs, le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, avait déjà annoncé des poursuites contre tous les responsables présumés du creusement du déficit budgétaire et de la dette publique, y compris d’anciens ministres, directeurs généraux, comptables et gestionnaires impliqués.
« La Cour des comptes a déposé les résultats de l’audit sur les finances publiques, et ces irrégularités dépassent les simples erreurs comptables », soulignait-il en février dernier lors d’une conférence de presse gouvernementale, précisant qu’une série d’enquêtes serait ouverte sur des infractions graves telles que « le faux en écriture, le faux en informatique, le détournement de fonds publics, l’escroquerie et le blanchiment d’argent ».
ODL/Sf/ac/APA