Au Sénégal, les réformes consensuelles sur le secteur de la justice, objet d’un rapport remis au président jeudi, devraient être bientôt entamées. Diomaye Faye entend ainsi poursuivre les ruptures systémiques annoncées.
Le président Bassirou Diomaye Faye a reçu jeudi le rapport final des assises de la justice, tenues du 28 mai au 4 juin dernier. A l’ensemble des parties prenantes, il a réitéré sa volonté de donner « un contenu clair » aux propositions qui sont de nature très originale et révolutionnaire.
Réitérant le désir de rupture systémique exprimé le 24 mars dernier par les citoyens à travers son élection au premier tour, le nouveau président dit prendre conscience de « l’exigence de réforme et de modernisation » de la justice sénégalaise, très critiquée sous les différents régimes qui se sont succédé à la tête du pays depuis son indépendance en 1960.
« Les réformes sur le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), l’ouverture des professions libérales, la mise aux normes des lieux de détention, l’africanisation des symboles de la justice, l’encadrement des pratiques illégales comme le retour de parquet, la refonte du Code pénal et du Code de procédure pénale, afin d’en extraire les dispositions abusives et arbitraires, seront au cœur de mes préoccupations », a promis le président Faye, engagé dans la correction des « imperfections » et « lacunes » du cadre juridique sénégalais.
Le chef de l’Etat de 44 ans ne dispose pas pour le moment de la majorité parlementaire pour entamer ces réformes, alors qu’il ne peut pas, au vu de la constitution, dissoudre la présente Assemblée nationale, élue le 31 juillet 2022 et installée en septembre 2022, avant les deux ans de législature.
Dans son programme, il avait promis de quitter le CSM. Mais les participants au dialogue sur la réforme de la justice ont eu des « points de dissonance » sur la question. « Je ne tiens absolument pas à rester au CSM, mais je ne tiens pas non plus à en sortir », a précisé Bassirou Diomaye Faye. Il soutient qu’il faut « prêter une oreille attentive aux magistrats », même si sa promesse de sortir du CSM était motivée par une volonté de matérialiser l’indépendance des juges qui, ainsi, ne seraient plus soumis au pouvoir exécutif.
En outre, le président Faye note que l’administration pénitentiaire fera l’objet d’une « attention particulière » à travers l’amélioration des conditions de détention et la restauration de la dignité des détenus. « Les interrogations et les propositions apportées sur les imaginaires, les valeurs et la perception de la justice seront à même de guider les prochaines mutations pour mieux arrimer le service public de la justice aux normes culturelles africaines », a-t-il indiqué, entendant donner un sens aigu à « la transformation digitale avec la dématérialisation et la numérisation » des procédures judiciaires.
La rupture dans la justice sera également opérée par la « création de nouvelles institutions », comme la haute autorité de la justice, la Cour constitutionnelle, ainsi que l’instauration d’un juge des libertés et de la détention. « L’heure des transformations systémiques de notre justice a sonné. Il est impératif de donner un contenu clair à ces différentes propositions afin de rétablir la relation de confiance et de respect mutuels entre la justice et les justiciables », a souligné le chef de l’Etat.
ODL/ac/Sf/APA