Un tribunal rwandais a rejeté mardi l’appel d’une figure de l’opposition qui réclamait l’annulation de ses condamnations antérieures, ce qui le disqualifie de l’élection présidentielle de juillet et l’empêche de défier le président Paul Kagame.
Bernard Ntaganda, 55 ans, farouche opposant à M. Kagame, a demandé en février à la Haute Cour de Kigali d’annuler des condamnations remontant à plus d’une décennie.
Trois juges ont collégialement rejeté le recours de M. Ntaganda, arguant que le responsable politique n’a pas payé quelque 106.000 francs rwandais (76 euros) de frais de justice en lien avec une précédente affaire.
« La Haute Cour a conclu que M. Ntaganda n’a pas respecté la loi qui impose aux individus de demander l’annulation de leur condamnation, et rejette ainsi son appel », a déclaré le tribunal dans sa décision.
M. Ntaganda, avocat et fondateur du parti PS-Imberakuri, a expliqué détenir la preuve du paiement de ces frais. Selon lui, la décision du tribunal « n’était pas un résultat surprenant ».
« Le FPR (Front patriotique rwandais) au pouvoir ne peut pas permettre aux tribunaux d’être indépendants », a déclaré l’opposant à l’AFP.
Il s’agit de la deuxième figure de l’opposition empêchée de participer au scrutin présidentiel du 15 juillet contre Paul Kagame, homme fort du Rwanda depuis la fin du génocide en 1994 et considéré comme le favori pour décrocher un nouveau mandat.
En mars, une autre opposante de longue date, Victoire Ingabire, avait échoué à obtenir en justice la restauration de ses droits civiques après une condamnation à une peine de prison en 2013, ce qui lui interdit de se présenter.
M. Ntaganda avait tenté de se présenter à la présidentielle en 2010 mais avait été arrêté avant le vote. Il avait ensuite purgé une peine de quatre ans d’emprisonnement pour menaces envers la sécurité de l’Etat et attisement des divisions ethniques avant d’être libéré en 2014.
Or en vertu de la loi rwandaise, une personne condamnée à plus de six mois de prison ne peut exercer de fonction publique.
Crédité du spectaculaire développement du Rwanda, exsangue au sortir du génocide, Paul Kagame est régulièrement accusé de bafouer la liberté d’expression et de réprimer toute opposition.
Elu président par le Parlement en avril 2000, il a obtenu plus de 90% des voix aux présidentielles qui se sont tenues depuis au suffrage universel en 2003, 2010 et 2017.
Jusqu’en 2015, la constitution rwandaise limitait le nombre de mandats présidentiels à deux septennats.
Une révision constitutionnelle controversée, approuvée par referendum en décembre 2015, a réduit la durée du mandat présidentiel à cinq ans tout en maintenant la limitation de deux mandats.
Elle prévoyait que cette réforme, non rétroactive, entre en vigueur après un septennat transitoire entre 2017 et 2024, que Paul Kagame a été autorisé à briguer.
Le chef de l’Etat peut également se présenter à deux nouveaux quinquennats, et donc potentiellement rester au pouvoir jusqu’en 2034.
Avec AFP