L’élection présidentielle du 15 juillet au Rwanda opposera le président Paul Kagame, favori à sa propre succession, aux mêmes adversaires que lors du scrutin de 2017 : le dirigeant du seul parti d’opposition autorisé, Frank Habineza, et le candidat indépendant, Philippe Mpayimana.
Frank Habineza, visage de l’opposition autorisée
Âgé de 47 ans, Frank Habineza est le fondateur et dirigeant du Parti démocratique vert (DGPR), seule formation d’opposition autorisée par le pouvoir. En 2017, il avait obtenu 0,48 % des suffrages. Avant de s’engager en politique, Frank Habineza a travaillé au ministère des Terres, de l’Environnement, des Eaux, des Forêts et des Mines et dans des organisations de protection de l’environnement. Son départ en août 2009 du parti au pouvoir, le Front patriotique rwandais (FPR), a marqué le début d’un parcours politique fait de menaces de mort, de prison et d’exil.
En 2010, son ami et vice-président du parti, André Kagwa Rwisereka, a été retrouvé quasi-décapité, un meurtre non élucidé dans lequel le pouvoir a démenti toute implication. Frank Habineza part alors en Suède avec sa famille.
Il revient au Rwanda en 2012, laissant en Scandinavie sa femme et ses trois enfants. « Vous ne pouvez rien changer en restant assis à faire de la politique de salon », déclarait-il à l’AFP en mars : « Vous devez être à l’intérieur du système, combattre le système ».
Finalement autorisé par le pouvoir en 2013, le DGPR – qui revendique un million de membres – a fait son entrée à l’Assemblée nationale en 2018 avec l’élection de deux députés, dont M. Habineza.
Durant sa campagne, il a promis notamment l’augmentation des salaires des médecins et enseignants, l’abolition de la taxe foncière, une modernisation de l’agriculture permettant d’augmenter la production tout en protégeant l’environnement. Il réclame également une plus grande liberté d’expression dans le pays, tout en prenant soin de ne pas attaquer frontalement le tout-puissant Paul Kagame.
Philippe Mpayimana, indépendant et « opposant pacifique »
Philippe Mpayimana, 54 ans, se présente pour la deuxième fois à la présidentielle en tant que candidat indépendant. En 2017, il avait récolté 0,73 % des voix.
Cet ancien journaliste, ayant notamment travaillé en 1990-91 aux débuts de la chaîne de télévision rwandaise (TVR), a quitté le Rwanda en 1994 pour la RDC, en même temps que des centaines de milliers de Hutu fuyant l’avancée du FPR, rébellion tutsi qui allait mettre fin au génocide et prendre le pouvoir.
Il a vécu au Congo-Brazzaville et au Cameroun avant de s’installer en France en 2003. Depuis 2012, il partage son temps entre la France et le Rwanda.
Il se présente comme un « opposant pacifique ». « Je suis un opposant dans le sens rwandais du terme. Pour certains, s’opposer c’est s’insulter, passer son temps à dire du mal », explique-t-il, disant se présenter à l’élection « sans montrer une quelconque hostilité » et en considérant « les acquis » des années Kagame.
« Je reconnais le bon bilan mais je ne souhaite pas que mon peuple continue uniquement à applaudir, nous devons préparer l’après », explique-t-il, disant notamment vouloir réformer le Code du travail et rénover et développer les infrastructures de transports.
Il est depuis 2021 « expert principal sur l’engagement communautaire » au ministère rwandais de l’Unité nationale et de l’engagement civique. Il a également écrit plusieurs ouvrages, livrant ses réflexions sur la société rwandaise.
APA avec AFP