A moins de trois mois du scrutin pour la présidence de la Banque africaine de développement (BAD), Sidi Ould Tah multiplie les manœuvres diplomatiques pour renforcer sa candidature à la tête.
Après avoir obtenu l’appui discret, mais stratégique du président ivoirien Alassane Ouattara, le patron de la BADEA, Sidi Ould Tah est en passe de rallier le Congo-Brazzaville, la Tunisie et même l’Italie à sa cause, une avancée qui pourrait peser lourd dans le jeu des alliances.
Pour orchestrer cette montée en puissance, le président mauritanien Mohamed Ould El Ghazouani a misé sur son efficace ministre de l’Économie et des Finances, Sid’Ahmed Ould Bouh, devenu l’homme-clé de cette campagne discrète.
Depuis fin 2024, Ould Bouh a enchaîné une dizaine de voyages officiels, en multipliant les rencontres de haut niveau pour sécuriser des soutiens. Ces dernières semaines, le ministre mauritanien a échangé coup sur coup avec le président tunisien Kais Saied à Tunis, et Fabrizio Saggio, conseiller diplomatique de Giorgia Meloni à Rome.
Il a également échangé avec le président congolais Denis Sassou Nguesso. Ce dernier a récemment reçu à Oyo, le ministre mauritanien de l’Économie et des finances, Sid’Ahmed Ould Bouh, accompagné de Sidi Ould Tah lui-même.
« Il est tout à fait normal que, lorsque la Mauritanie présente une candidature, le processus de concertation et de recherche de soutien passe par Brazzaville », a fait savoir l’émissaire du président mauritanien Mohamed Ould El Ghazouani.
La position de la Côte d’Ivoire et du Nigéria restent une carte maîtresse dans cette campagne. Sans déclaration officielle, Alassane Ouattara avait laissé filtrer des signaux clairs de son appui à la candidature mauritanienne. Un choix qui pourrait peser dans les arbitrages au sein de l’UEMOA, où la Côte d’Ivoire fait figure de locomotive.
Sidi Ould Tah, réputé de facto candidat du Nord, mise aussi sur l’Arabie saoudite. Le candidat mauritanien peut avancer son bilan à la BADEA, où il a mené un plan stratégique de 18,4 milliards de dollars, et renforcé le rôle de son institution comme passerelle financière entre le Golfe et l’Afrique.
Les candidats en lice, notamment Samuel Munzele Maimbo (Zambie, soutenu par la SADC) et Amadou Hott (Sénégal, soutenu par une partie de la CEDEAO), ou même la vice-présidente sortante Bajabulile Swazi Tshabalala continuent leurs propres offensives diplomatiques.
L’un des enjeux majeurs reste le positionnement des actionnaires non africains, qui pèsent 40% des voix. Les États-Unis, deuxième actionnaire après le Nigéria avec 6,5% des votes, n’ont pas encore affiché de préférence, mais leur soutien pourrait faire pencher la balance.
D’ici au 29 mai prochain, les manœuvres d’influence s’intensifieront, avec une BAD plus que jamais au cœur des luttes d’influences en Afrique de l’Ouest. L’élection du président du groupe bancaire aura lieu à Abidjan.
Dans le prolongement de l’action saluée du président Ghazouani à la tête de l’Union africaine, où il a renforcé l’institution par sa finesse diplomatique, l’élection de Sidi Ould Tah à la BAD confirmerait la place nouvelle occupée par la Mauritanie sur l’échiquier politique de l’Afrique.
AP/Sf/APA