Journée décisive au Mozambique qui retient son souffle, alors que le Conseil constitutionnel s’apprête à annoncer les résultats des élections présidentielles et législatives. Journée
Le Mozambique est à un tournant critique ce lundi, alors que la validation officielle des résultats controversés des élections présidentielles et législatives du 9 octobre est attendue. Ce scrutin, qui a entraîné des troubles majeurs dans le pays d’Afrique australe, fait l’objet de contestations à travers des manifestations de grande ampleur.
Maputo, la capitale du Mozambique, s’est transformée lundi en une ville quasi déserte. Les principaux axes sont bloqués par des barricades, les magasins restent fermés et les rues habituellement animées en cette période pré-festive sont étrangement calmes. Des forces de l’ordre ont érigé des barrages autour du palais présidentiel et du Conseil constitutionnel, à l’origine de l’annonce prévue à 15h00 (13h00 GMT).
Depuis deux mois, le Mozambique est secoué par des manifestations et des grèves qui ont fait au moins 130 morts, selon l’ONG locale Plataforma Decide. Ces décès concernent majoritairement des manifestants tués par balles. La crise post-électorale actuelle est considérée comme la plus grave de l’histoire récente du pays.
Le Conseil constitutionnel doit confirmer ou infirmer la victoire de Daniel Chapo, candidat du parti au pouvoir Frelimo, annoncé vainqueur avec 71 % des suffrages. Venancio Mondlane, principal opposant, revendique cependant 53 % des voix sur la base d’un comptage parallèle. Il dénonce des irrégularités majeures, également relevées par des missions d’observation internationales.
« Le Conseil constitutionnel n’est pas politiquement indépendant », affirme Borges Nhamirre, chercheur mozambicain de l’Institut d’études pour la sécurité à Pretoria. Cette proximité perçue avec le pouvoir alimente les prédictions de troubles massifs.
Depuis l’étranger où il s’est réfugié, Venancio Mondlane continue de mobiliser ses partisans à travers les réseaux sociaux. Ce leader charismatique, surnommé simplement « Venancio », a promis un retour potentiel pour l’investiture prévue en janvier. « Si on doit perdre la vie dans un combat juste, on la perdra », a-t-il déclaré.
L’analyste Johann Smith estime que « après un si long mouvement de contestation, cela va au-delà de Venancio ». Le soulèvement s’inscrit selon lui dans une dynamique régionale où plusieurs partis historiques au pouvoir sont confrontés à une érosion de leur hégémonie. Cette situation rappelle le recul de l’ANC en Afrique du Sud ou encore la défaite historique du BDP au Botswana cette année.
Avec une économie informelle dominante et une grande partie de la population mozambicaine vivant au jour le jour, les troubles prolongés risquent d’aggraver les inégalités dans un pays déjà parmi les plus pauvres du monde. Pourtant, nombreux sont ceux qui voient dans ce mouvement une opportunité de tourner la page du Frelimo, au pouvoir depuis l’indépendance en 1975.
Les prochaines heures seront cruciales pour l’avenir du Mozambique, alors que les tensions atteignent leur paroxysme. La communauté internationale suit de près l’évolution de cette crise qui pourrait redéfinir les rapports de force dans la région.
APA/Sf/AFP