Quelques mois après avoir été condamné pour s’être prononcé sur la crise énergétique au Mali, l’Imam Bandiougou Traoré vient d’être placé en garde à vue pour un sermon «misogyne».
L’affaire de l’Imam Bandiougou Traoré, figure déjà bien connue pour ses prises de position controversées, continue de faire les gros titres. Ce mardi 10 septembre 2024, le religieux a été placé en garde à vue à Bamako après avoir été interpellé la veille, lundi 9 septembre 2024. Il est reproché à l’imam d’avoir tenu des propos jugés discriminatoires et misogynes lors de son sermon du vendredi 6 septembre 2024, où il s’en est pris aux femmes militaires et sportives, notamment celles qui pratiquent le basketball et portent des vêtements jugés inappropriés par le prédicateur.
Le sermon de l’Imam Traoré a suscité une indignation immédiate au sein des organisations de défense des droits des femmes. Il y dénonçait le port de tenues sportives, telles que des leggings, par des femmes qu’il a décrites comme ne respectant pas les valeurs islamiques traditionnelles.
Ces propos ont provoqué une vague de réactions, notamment de la part d’organisations féministes qui y ont vu une attaque directe contre les droits des femmes à participer pleinement à la société, que ce soit dans les forces armées ou dans le domaine du sport.
Les répercussions de ce sermon se sont rapidement fait sentir, avec des appels de la société civile pour que des sanctions soient prises contre l’Imam.
Cette interpellation n’est pas la première pour l’Imam Traoré. En mars dernier, il avait déjà été condamné à une peine de 18 mois de prison, dont 16 avec sursis, pour trouble à l’ordre public et offense aux autorités. Cela faisait suite à un autre sermon dans lequel il critiquait sévèrement la gestion de la crise énergétique par les autorités maliennes. Le pays, qui fait face à des coupures d’électricité récurrentes, est plongé dans une crise énergétique dont l’issue semble encore lointaine. L’Imam avait alors accusé les autorités de ne pas avoir de solution viable, provoquant ainsi des troubles à l’ordre public par la propagation de messages jugés déstabilisateurs.
L’interpellation de l’imam Bandiougou Traoré et son placement en garde à vue ce mardi relancent le débat sur la liberté d’expression religieuse au Mali et sur la manière dont elle doit être régulée, notamment lorsqu’elle porte atteinte aux droits des femmes. Les autorités maliennes devront maintenant décider si de nouvelles poursuites judiciaires seront engagées contre l’imam pour ses propos du 6 septembre 2024.
Le Pôle de lutte contre la cybercriminalité, dirigé par le procureur Dr. Adama Coulibaly, a été saisi de l’affaire et les mouvements de défense des droits des femmes ne comptent pas en rester là. Plusieurs organisations préparent d’ores et déjà des plaintes formelles pour incitation à la haine et à la discrimination.
La situation juridique de l’Imam Traoré pourrait s’aggraver si ces nouvelles plaintes venaient à aboutir. Son influence au sein de la communauté musulmane du Mali, bien qu’importante, est aujourd’hui mise à mal par ces multiples accusations.
MD/ac/Sf/APA