Ce document met à rude épreuve l’alliance entre civils et militaires scellée en mai 2021 suite à la « rectification » de la transition installée neuf mois plus tôt.
Pour la première fois depuis le déclenchement de l’affaire, le premier ministre de la transition malienne, Choguel Maïga a pris position sur le mémorandum publié par ses partisans à l’occasion du troisième anniversaire de sa désignation.
M. Maïga a déclaré que ce mémorandum, défendu par Bouba K. Traoré, président du mouvement M5-RFP qui lui est favorable, ne contient « aucun point qui est faux ». Pendant presque un an, ses partisans voulaient s’exprimer, mais il leur a demandé de patienter. À l’occasion du troisième anniversaire de sa nomination, ils ont estimé qu’il était temps de parler et il n’a pas pu les en empêcher. « L’essentiel, c’est de dire la vérité », a-t-il affirmé, endossant ainsi pleinement les déclarations du document.
En réponse aux critiques, le premier ministre a dénoncé ceux qu’il appelle des « agents doubles » et des « collaborateurs de l’étranger », leur reprochant de n’avoir pas lu le document en entier, se contentant de sortir les passages les plus critiques pour l’accuser de s’opposer à la transition dirigée par les militaires.
Il a rappelé son expérience politique, ayant travaillé avec trois chefs d’État, et affirmé que la politique est « l’art de réaliser ce qui est possible et rendre possible ce qui est nécessaire ».
Bouba K. Traoré a été arrêté le 27 mai 2024 à la Primature, puis placé sous mandat de dépôt après une longue journée d’interrogatoire. Il est poursuivi pour « délit d’atteinte au crédit de l’État, outrage à magistrat et trouble à l’ordre public ». Le mémorandum signé par Traoré critique la violation du « Pacte d’honneur » de mai 2021, dénonce le limogeage des ministres du M5-RFP sans consultation, et déplore l’exclusion du Premier ministre des décisions clés.
Points de discorde
Le document exprime également des inquiétudes sur la gestion de la réorganisation territoriale, de la crise énergétique et d’autres événements marquants comme le meeting du 8 juin 2023 et la création de l’Alliance des États du Sahel (AES). Il dénonce le retour de pratiques autoritaires et les arrestations extrajudiciaires de membres du M5-RFP.
Le procureur du Pôle national de lutte contre la cybercriminalité a rapidement pris en charge l’affaire et Bouba K. Traoré attend son procès prévu pour le 1er juillet, incarcéré à la Maison Centrale d’Arrêt de Bamako. Il reste à voir quelles seront les répercussions pour le premier ministre, maintenant qu’il a publiquement endossé la responsabilité du mémorandum.
Ces déclarations du Premier ministre ont été faites lors d’une réception organisée pour la fête de la Tabaski. Cet événement a été critiqué par certains, qui y voient une violation de la suspension des activités politiques décidée en mars dernier. Cela contraste avec la situation d’autres acteurs politiques, empêchés d’organiser des réunions.
MD/ac/APA