La police sud-africaine a mis fin à un camp d’entraînement et arrêté 95 Lybiens entrés dans le pays pour une formation de vigiles. L’enquête se poursuit afin de déterminer les véritables motivations de ce groupe mis en détention « pour infraction à la législation sur l’immigration ».
Quatre-vingt-quinze Libyens, venus officiellement en Afrique du Sud pour une formation de vigiles, ont été arrêtés vendredi, soupçonnés de suivre un entraînement dans une ferme proche du Mozambique, apparemment utilisée comme camp militaire clandestin, a annoncé la police.
Un raid de la police a eu lieu tôt vendredi à White River, dans la province de Mpumalanga, à environ 360 km à l’est de Johannesburg, non loi du célèbre parc Kruger, a-t-elle précisé.
« Les 95 personnes arrêtées sont toutes de nationalité libyenne et actuellement entourées par les autorités compétentes », a précisé la police dans son communiqué.
Ces Libyens sont arrivés en Afrique du Sud en avril selon les autorités. « Ils se sont faussement représentés sur leur demande de visa pour l’Afrique du Sud, affirmant venir suivre une formation d’agents de sécurité », a déclaré sur X la porte-parole de la police, Athlenda Mathe.
La police du Mpumalanga « les soupçonne d’avoir reçu un entraînement militaire » et ils ont été arrêtés pour infraction à la législation sur l’immigration, a-t-elle précisé.
Dans un communiqué sur Facebook, le gouvernement de Libye, reconnu par l’ONU, a diffusé « un démentit formel et clair » de tout lien avec ce groupe, assurant de coopérer à l’enquête pour établir l’identité de ses membres.
Des images télévisées tournées dans le camp présumé montraient des tentes kakis et des sacs de sable, et des groupes d’hommes arrêtés, en tenue civile.
Sur la carte extérieure, le lieu est signalé comme une académie proposant « un entraînement de sécurité spécialisé », a constaté un journaliste de l’AFP sur place.
Aucune arme ni matériel illégal n’a été saisi dans l’immédiat, mais des recherches se poursuivent, a indiqué la police à l’AFP.
Le raid a été lancé deux jours après des renseignements reçus par les autorités à propos de cette ferme, proche du Mozambique et de l’Eswatini (ex-Swaziland) et elles n’excluent pas l’existence de camps similaires dans la région.
Pour le groupe arrêté, l’option devrait être de les renvoyer dans leur pays, a-t-il dit.
Le propriétaire de la société de sécurité dirigeant la structure est un Sud-Africain, a précisé un porte-parole de la police, Donald Mdhluli, à l’AFP.
La plupart des Libyens arrêtés ne parlent pas anglais et il n’était pas immédiatement possible de clarifier s’ils sont affiliés à un quelconque groupe, a-t-il dit.
« Nous les soupçonnons de délits graves parce que nous avons reçu de nombreuses plaintes de la communauté, y compris pour viol », a précisé M. Mdhluli.
L’Afrique du Sud est un terrain propice à la criminalité du fait de frontières relativement poreuses, et du niveau de corruption et de criminalité locale. Cette situation alimente un marché florissant et une industrie de la sécurité privée véritable.
Le pays compte plus de 15 000 sociétés de sécurité employant quelque 2,8 millions d’agents – pour près de 60 millions d’habitants -, selon l’autorité locale de régulation du secteur.
L’Afrique du Sud, qui n’a jamais été réellement concernée par les attentats jihadistes, est considérée comme une place forte du financement du groupe Etat islamique (EI) et d’autres organisations islamistes.
Mardi, le Département du Trésor américain a annoncé des sanctions contre des bases de l’Etat islamique présentées comme actifs en Afrique du Sud et pratiquant le braquage ou des kidnappings pour se financer.
La Libye, de son côté, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, peine toujours à se remettre de plusieurs années de guerre et de chaos. Malgré un calme relatif ces quatre dernières années, ce pays pétrolier connaît régulièrement des affrontements entre une myriade de groupes armés.
La plupart sont soit affiliés au gouvernement d’Abdelhamid Dbeibah, reconnu par l’ONU, ou à un exécutif parallèle rival, affilié au camp du puissant maréchal Khalifa Haftar, qui règne sur l’est et une partie du sud.
Selon le politologue Jalel Harchaoui, chercheur associé auprès de l’institut britannique Royal United Services, il est notoire que les différentes factions libyennes cherchent à s’entraîner à l’étranger pour se doter d’unités militaires d’élite. La presse irlandaise s’est récemment fait l’écho d’une société irlandaise payant l’entraînement des forces pro-Haftar. « C’est souvent sous couvert de sociétés de sécurité privée », dit-il.
Sf/APA avec AFP