Cellou Dalein Diallo, comme on pouvait s’y attendre, s’est autoproclamé vainqueur de la présidentielle du 18 octobre dernier. Mais la stratégie du candidat de l’UFDG fait craindre des heurts sanglants si la Ceni prend son contre-pied.
Qu’on se le tienne pour dit, le risque de troubles est très élevé en Guinée. Tout d’abord parce que le principal rival du président sortant, Alpha Condé, a battu campagne sur le thème « C’est l’heure ». Un slogan qu’il a ensuite explicité par un tweet annonciateur : « 2020 n’est pas 2010. Encore moins 2015. Nous sommes prêts ! ». Enfin Cellou Dalein Diallo a dit, devant notamment des partisans survoltés, être sorti « victorieux de cette élection dès le premier tour ».
C’était hier lundi en début d’après-midi. Une annonce aussitôt accueillie avec ferveur par les militants de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) dans les rues de Conakry. Pour disperser la foule, les forces de l’ordre ont usé de gaz lacrymogènes. Mais pas que selon l’opposant historique d’Alpha Condé.
En effet, l’ancien Premier ministre sous Lansana Conté (1984-2008) accuse, sur son compte Twitter, les forces de sécurité d’avoir entraîné « la mort de trois jeunes garçons » en tirant à balles réelles sur ses souteneurs qui « célébraient pacifiquement (sa) victoire ».
Quelques heures plus tôt, Naby Youssouf Kiridi Bangoura, le porte-parole du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG, parti au pouvoir), a dénoncé « l’attitude antirépublicaine et antidémocratique » de Cellou Dalein Diallo qui aurait dû, d’après la mouvance présidentielle, s’abstenir de proclamer des résultats. Une mission dévolue à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni).
En tout cas, le RPG et l’UFDG se rendent coup pour coup. Surtout sur les réseaux sociaux. Pour remporter la bataille de l’opinion publique, les deux camps ont sorti l’artillerie lourde. Pourtant, l’actuel locataire du palais présidentiel, juste après l’accomplissement de son devoir civique, a lancé un appel « au calme, à la discipline et à la transparence totale ». Ce mardi, Alpha Condé a soutenu que « la Guinée est une et indivisible ».
De son côté, Augustin Matata Ponyo Mapon, le chef de la Mission d’observation de l’Union Africaine (UA) a assuré, dans un rapport préliminaire, que « tous les Guinéens, remplissant les conditions et qui se sont rendus dans les lieux de vote, ont pu exercer leur droit ». Par conséquent, son homologue de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), José Maria Neves, a invité tout le monde « à respecter les résultats sortis des urnes ».
Pour l’heure, l’on n’en prend pas le chemin. Convaincu de son triomphe, Cellou Dalein Diallo a récemment appelé « (ses) compatriotes épris de paix et de justice à rester vigilants et mobilisés pour défendre cette victoire de la démocratie ».
Ce dernier a fait le choix de participer à la présidentielle contrairement à la ligne du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC). Un collectif de partis d’opposition et d’organisations de la société civile qui a tenté de faire barrage au troisième mandat de Condé. Ces formations politiques avaient même boycotté les Législatives et le référendum constitutionnel.
Toutefois, le pari de l’UFDG pourrait être gagnant. En 2012, Macky Sall a remporté la présidentielle sénégalaise au second tour devant Abdoulaye Wade qui briguait, contre vents et marées, un troisième mandat. Jusque-là, la Guinée indépendante depuis 1958 n’a pas encore connu une alternance démocratique. En 2020, le réveil des vieux démons hante donc tous les esprits.
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