Le Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, au pouvoir), qui a porté son choix sur Amadou Gon Coulibaly comme candidat à la prochaine présidentielle, a pris de l’avance sur ses adversaires, analyse pour APA, le journaliste camerounais Louis Keumayou.
Est-ce que la désignation d’Amadou Gon Coulibaly comme candidat du RHDP à la présidentielle était prévisible ?
C’était un secret de Polichinelle. Ce n’est pas une surprise aujourd’hui. C’était le choix du président Ouattara et du Conseil politique. Maintenant, il faudra que ça devienne le choix du RHDP, à la fois au niveau de l’appareil mais également des militants. Parce que le président Ouattara a dit qu’il voulait passer la main à la jeunesse. Je ne sais pas si Amadou Gon Coulibaly incarne la jeunesse au sein du RHDP ? Nous verrons bien comment cette décision sera accueillie. Une chose est certaine : c’est qu’elle ne cadre pas avec la promesse que le président Ouattara a faite quand il a annoncé qu’il ne se présenterait pas comme candidat pour un troisième mandat à la tête de la Côte d’Ivoire.
Gon Coulibaly dit avoir été choisi à l’unanimité par le Conseil politique. Mais n’y a-t-il pas de mécontents au sein de la coalition ?
Faire l’unanimité au sein du Conseil politique n’est souvent pas le plus compliqué. Mais au sein de la population ivoirienne, cela n’est pas gagné. Parce qu’il me semble qu’au sein du RHDP, il y a des tendances devenues des points de scission. On le voit avec le PDCI-RDA, avec le cas de Guillaume Soro (ex-président de l’Assemblée nationale en exil) qui a des velléités de devenir président de la République et avec d’autres qui manifestent leur mécontentement différemment. Mais une chose est certaine, c’est que le choix du Conseil politique ne fera pas l’unanimité au sein des militants. Et je pense que c’est au sein de ces derniers qu’on a besoin de rassembler son camp pour être certain qu’en allant dans la bataille, on ne perdra pas de voix en cours de route.
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Pour convaincre certains réticents du RHDP qu’il peut être le successeur de Ouattara, que doit-il faire ?
Amadou Gon Coulibaly a été un homme très fidèle à Alasssane Ouattara. Je pense qu’il le lui rend bien en lui donnant la chance malgré les réticences dans son camp de devenir candidat à sa succession. Mais là, il succède en tant que candidat du parti, pas en tant que président de la République. Les choses pour lui ne font que commencer.
S’il s’agit de la famille politique, l’ambition pour Amadou Gon Coulibaly sera de réconcilier son camp pour aller unanimement vers l’élection de 2020. C’est ce qui lui (Ouattara) avait permis de prétendre battre le président Laurent Gbagbo lors de l’élection de 2010. C’est ce qui lui fera peut-être défaut en 2020 pour rééditer cet exploit.
A côté de cela, devenir président de la République est une toute autre bataille que de rassembler toute sa famille politique. L’ambition n’est pas d’être président d’un camp politique, mais le président de tout un pays capable d’entretenir la flamme qu’a allumée Félix Houphouët Boigny (1960-1993) dans ce pays d’Afrique de l’ouest qui reste un des plus importants après le Nigeria en termes d’économie, notamment dans l’espace francophone.
Quelle conséquence cette désignation peut avoir sur la scène politique ivoirienne ?
C’est un peu tôt pour parler des conséquences du choix du candidat du RHDP. Ce parti a toutefois une longueur d’avance en désignant son candidat. Il peut déjà commencer le travail de campagne, à la fois au sein de son parti vu qu’il y a des personnes qui ne sont pas satisfaites par ce choix du Conseil politique. Cela fait que les autres sont obligés aujourd’hui d’aller à peu près à la même vitesse que le RHDP, mais en étant dans la réaction. Ils ne seront pas dans l’action comme le fait le RHDP.
Quels sont les profils qui se dégagent dans l’opposition pour lui barrer la route ?
Je pense que dans une élection présidentielle, l’intention n’est pas de barrer la voie à un candidat mais de faire mieux que lui. Cela suppose un projet de société meilleur qui permettra de tenir la dragée haute à tous ses concurrents politiques. Le candidat du RHDP Amadou Gon Coulibaly est un homme de dossiers. Il est suffisamment compétent pour la tâche à laquelle il est prédestiné.
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Il y a Mamadou Koulibaly (ancien du FPI, ex-président de l’Assemblée nationale) qui est candidat. Le Front Populaire Ivoirien va probablement avoir un ou deux candidats. Et puis, il y aura d’autres candidats qui se signaleront. C’est tôt de toute façon pour dire si le président Henri Konan Bédié (1993-1999) sera finalement candidat ou pas à l’élection présidentielle. C’est tôt également pour savoir si Guillaume Soro sera tenté de revenir en Côte d’Ivoire pour déposer sa candidature et donc entrer dans la course.
Il y a beaucoup d’éléments et de zones d’ombre qui ne permettent pas d’avoir une analyse définitive de la situation. Cependant, il y a une chose qui est certaine : la compétition est ouverte et le camp du RHDP est prêt pour la bataille.
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