L’Etat de Côte d’Ivoire a adopté une rallonge de 220 millions de Fcfa en vue d’éradiquer, en 2021, la Peste porcine africaine (PPA) dans les régions du Poro et du Tchologo, dans le Nord ivoirien, où la maladie a entraîné l’abattage de plus de 31.000 têtes en 2017.
Des cas d’infection du virus de la PPA, découverts en 2017 dans le Nord du pays à partir du département de Ouangolodougou, ville frontalière avec le Burkina Faso, pays d’enzootie de la maladie, a amené le gouvernement à procéder à des abattages sanitaires.
Suite à l’annonce par les autorités, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a mis en place un Programme de coopération technique intitulé Projet d’assistance d’urgence pour la lutte contre la PPA dans les régions du Tchologo et du Poro.
L’objectif de ce programme étant de circonscrire la maladie en soutenant les efforts du gouvernement ivoirien à travers le ministère des Ressources animales et halieutiques dans la prévention, la préparation et la détection précoce du virus de la PPA.
La maladie a particulièrement occasionné la mort de plus de 10.000 porcs et entrainé l’abattage sanitaire de 31.108 porcs modernes et traditionnels chez 887 éleveurs dans le Nord ivoirien.
Lancé officiellement en juillet 2019 par la FAO en Côte d’Ivoire, le projet de coopération technique a pris fin le 30 septembre 2020. Pour ce faire, l’institution a organisé un atelier de clôture du projet les 7 et 8 octobre 2020 à Grand-Bassam, à 40 Km au Sud-est d’Abidjan, à l’effet d’en faire un bilan.
Interrogé en marge de cet atelier, Ouattara Djakaria, chef de service chargé de la Planification à la Direction des services vétérinaires (DSV) au ministère des Ressources animales et halieutiques, a souligné que ce projet, co-financé par l’Etat de Côte d’Ivoire et la FAO a pour objectif d’améliorer la chaîne de valeur porcine dans le Nord du pays suite au sinistre survenu en 2017.
Initialement prévu pour deux ans, notamment de 2019 à 2020, l’Etat a fait une « rallonge pour l’année 2021 » vu l’engouement que ce projet, qui a engagé un repeuplement du cheptel porcin, a suscité auprès des fermiers.
Une « enveloppe de 220 millions Fcfa », dira-t-il, a été accordée par l’Etat ivoirien pour encore appuyer les actions qui ont été déjà menées. Ainsi, ce fonds devrait permettre l’acquisition d’un véhicule pour faciliter la mobilité dans les régions du Poro et du Tchologo.
Il est prévu aussi l’achat de motos pour les agents chargés de faire le suivi sanitaire de ces élevages. Dans cet élan, l’Etat prévoit l’installation encore de 60 autres fermes pilotes en raison d’un noyau de cinq truies et un mâle.
Le don de porcs sentinelles est accompagné par un apport en alimentation d’une valeur globale de 21 millions Fcfa pour faciliter l’alimentation des animaux pendant quelques mois, a fait savoir M. Ouattara.
En outre, l’appui devrait permettre un accompagnement en termes de médicaments vétérinaires pour faciliter le soin de ces animaux. Mais, aujourd’hui le projet est réévalué d’autant plus que la maladie semble être maîtrisée au nord. Par contre, à l’Ouest, la PPA est en latence.
Repeuplement
L’assistance en sentinelles est notamment due à la perte de plus de 31.000 animaux en 2017, ce qui représente, selon M. Ouattara « une perte de près de 9 milliards Fcfa ».
L’abattage sanitaire a littéralement sinistré des populations avec tous les impacts que cela a eu sur leur moyen d’existence. Certains ménages n’étaient plus capables de scolariser leurs enfants. En outre, la situation a entraîné la séparation de couples.
L’Etat a , de ce fait, jugé utile de les accompagner afin qu’ils puissent se relever de cette crise. Toutefois, les sentinelles octroyées pour les amener à respecter les normes de biosécurité, sont accordées selon des critères.
Il y a des conditions, fait observer M. Ouattara, qui note qu’il faut avoir un habitat de porcs, amélioré, et aux normes sanitaires requises, et être victimes d’abattage sanitaire.
Pour faciliter le choix et le suivi des activités de terrain, la DSV a installé est fait des Groupements de défense sanitaires (GDS), qui travaillent avec les services vétérinaires locaux pour faire le suivi et voir si la maladie circule ou pas.
Ce fonds additionnel devrait par ailleurs permettre de faire des prélèvements d’échantillons avec l’appui de la FAO, et l’acquisition de réactifs pour faciliter les analyses des laboratoires pour voir si la maladie de la PPA existe encore ou pas.
Impacts projet FAO
Selon Dr René Bessin, représentant à cet atelier bilan le représentant résident de la FAO en Côte d’Ivoire, Samy Gaiji, a relevé que ce projet de coopération technique a permis de doter la DSV d’un plan de contingence de lutte contre la PPA.
En outre, il a permis de mettre en place les procédures opérationnelles standard de gestion d’une épizootie de PPA ainsi qu’ un guide de bonnes pratiques de biosécurité.
A cela, s’ajoutent des matériels offerts tels que des GPS, des appareils photos, des motos de terrain (7) pour permettre une mobilité des agents vétérinaires, et 200 accumulateurs de froid et 60 glacières pour la conservation des vaccins.
Koné Soungalo, président du GDS de Ferkéssédougou, qui a perdu quasiment 800 têtes, avoue que la FAO nous a apporté une grande contribution après la peste porcine africaine de 2017.
La région du Tochologo, se rappelle-t-il, a perdu plus de 31.000 porcs avec plus de 600 éleveurs. Et, les porcs abattus ont créé une misère autour des populations, car le porc est essentiel pour ce peuple.
Le porc dans cette région sert à faire partir les enfants à l’école, de revenu de ménages, à payer les engrais et les herbicides pour les champs, à faire les initiations culturelles dans les villages, énumère-t-il, avant d’ajouter que la PPA a créé un « désastre » chez les populations.
L’appui de l’Etat a soulagé les populations surtout au niveau du repeuplement. Pour assurer un meilleur maillage, les fermiers ont institué une sorte de solidarité permettant à ceux qui bénéficient de noyaux de partager la production avec d’autres.
Adjoua Adibia, présidente des éleveurs de porcs à Ouangolodougou, présidente de GDS, note que dans sa zone, des fermiers ont reçu effectivement des sentinelles, une première vague le 23 mars 2020 et une seconde le 26 août 2020.
Actuellement, la difficulté majeure reste la nourriture, pour une croissance importante des porcs. « Il n’y a pas de concentré, on utilise seulement le son de riz et le son de maïs. Hormis cela, plus rien pour améliorer l’alimentation », dit-elle.
Les sentinelles ont « joué un rôle important parce que nous étions dans une détresse et maintenant quand on voit les animaux, il y a une joie qui nous anime, parce qu’on se dit que tout compte fait, on aura quelque chose pour nourrir la famille et scolariser les enfant », laisse-t-elle entendre.
Perspectives
En perspectives, la direction des services vétérinaires du ministère des Ressources animales et halieutiques envi sage de mettre en place un mécanisme pérenne de financement rapide pour les urgences concernant la Peste porcine africaine.
Elle envisage d’évaluer la situation de la PPA dans la zone du projet et les risques dans tout le pays à travers une enquête sérologique. Toute chose qui devrait permettre de mettre en oeuvre un programme national de lutte contre la PPA.
L’atelier a également recommandé un suivi sanitaire permanent et zootechnique au niveau des noyaux mis à la disposition des éleveurs. Cela devrait permettre de renforcer les efforts d’alimentation des habitats selon les types d’élevage.
Les vétérinaires ont surtout insisté sur l’élevage en claustration par rapport à l’élevage en divagation pour permettre de contenir la PPA. Mais, cela va nécessiter une sensibilisation et une formation des fermiers et des sociétés coopératives.
AP/ls/APA