Le gouvernement éthiopien continue d’insister sur le fait que l’offensive militaire contre le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) est une affaire interne, snobant ouvertement les efforts de médiation de l’Union africaine.
Lorsque trois anciens présidents africains se sont rendus à Addis-Abeba ce week-end pour rencontrer le Premier ministre Abiy Ahmad dans le but de le convaincre d’arrêter l’offensive et d’aller à la table des négociations pour parvenir à la paix, il leur a répété la même chose.
« Les forces éthiopiennes, a-t-il dit, sont engagées dans une campagne de maintien de l’ordre interne au Tigré et vont mener l’opération jusqu’à son terme ».
Le Premier ministre Abiy a invoqué la Charte de non-ingérence de l’Union africaine pour plomber les efforts du président mozambicain Joachim Chissano, d’Ellen Johnson Sirleaf du Libéria et de Kgalema Motlanthe d’Afrique du Sud.
Ainsi, les trois éminentes personnalités ont dû quitter Addis-Abeba les mains vides, alors que les combats faisaient toujours rage dans la capitale tigréenne, Mekele.
Mais après ce faux pas diplomatique, où en sont les relations de l’Ethiopie avec l’Union africaine (Ua) ?
L’Ethiopie, pays de la Corne de l’Afrique a joué un rôle central dans la création en 1963, de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) devenue Union africaine (UA).
Comme son prédécesseur, Addis-Abeba accueille le siège actuel de l’Ua, mais les efforts qu’elle déploie pour mettre fin au conflit au Tigré semblent contredire les principes mêmes qui guident l’objectif de l’organisation.
L’Ethiopie a joué un rôle central dans l’élaboration de l’Acte constitutif de l’Union africaine qui mentionne expressément le respect de l’inviolabilité des pays membres en tant que nations souveraines.
Il dissuade les membres de l’UA à s’ingérer directement dans les affaires intérieures d’un autre pays ; un principe qu’Abiy semble avoir utilisé pour contrecarrer efficacement la demande de trêve du bloc panafricain.
Cependant, avec l’idée d’empêcher une répétition du génocide rwandais clairement à l’esprit, l’article 4 (h) de la même loi dans des cas exceptionnels soutient l’intervention dans un Etat membre où des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité peuvent avoir été commis.
Certains observateurs estiment que la loi même que l’Ethiopie avait défendue et dont elle est devenue signataire est rejetée par Addis-Abeba.
L’empereur éthiopien, Hailé Sélassié, s’était présenté comme un champion de la paix, non seulement dans son pays mais à travers l’Afrique et le monde entier.
Addis-Abeba doit beaucoup à « l’offensive de paix » de Sélassié qui a été finalement choisie pour abriter le siège de l’OUA/Ua.
Après le camouflet retentissant infligé à l’Ua par Abiy, on ne sait pas quelle sera la prochaine attitude de l’organisation continentale.
Mais ce qui est sûr, c’est que ses diplomates se sentiront obligés de faire pression, en particulier avec l’aggravation de la situation humanitaire des civils pris au piège des combats et les rapports persistants sur des atrocités commises contre des non-combattants.
WN/as/fss/te/APA