Le nouveau visage de la politique, caractérisé par la violence, freine l’élan des femmes et des jeunes dans les débats politiques, selon une étude diligentée par la Chaire UNESCO « Eau, femmes et pouvoir de décisions » Côte d’Ivoire.
L’étude a été présentée jeudi à Abidjan par M. Trah Siagbé, expert en genre, à l’ouverture d’un atelier d’échanges sur la participation des femmes et des jeunes aux débats politiques. L’atelier qui se déroulera sur deux jours, a réuni une quarantaine de personnes.
« La peur du nouveau visage politique, caractérisé par la violence fait reculer les femmes » et les jeunes, a fait observer M. Trah Siagbé, qui note que le nombre limité des femmes et des jeunes dans les instances décisionnelles reste un défi.
L’étude souligne « l’attitude des femmes qui préfèrent rester dans leur coin », or, il leur faut davantage oser, a ajouté M. Trah Siagbé, indiquant que le manque de capacités opérationnelles et de formation en la matière, pour plusieurs, explique cette position.
« Très souvent, les femmes ont besoin de l’assentiment de leur conjoint avant de pouvoir participer (aux débats politiques), et parfois même de la famille ou de la communauté », a noté Professeur Rose Koffi-Nevry, enseignant-chercheur à l’Université Nangui-Abrogoua et responsable du programme formation à la Chaire Unesco Eau, femme et pouvoir de décision.
Mme Rose Koffi-Nevry qui représentait Mme Euphrasie Kouassi Yao, la conseillère spéciale du président de la République, chargée du Genre, a déclaré que ces différents stéréotypes et les violences qui entourent tout l’environnement électoral freinent les jeunes et les femmes à s’engager dans la politique.
Parfois, poursuivra-t-elle, « les femmes ne veulent pas que leurs enfants participent à ces débats politiques » a cause de ces facteurs, c’est pourquoi l’atelier a été initié pour adresser la faible participation des jeunes et des femmes dans la gouvernance élective.
« Il s’agit pour nous de pouvoir identifier les obstacles majeures qui freinent les femmes et les jeunes dans les débats politiques », car si ces personnes ne participent pas aux débats politiques, il va être difficile pour elles de pouvoir être présentes dans les Assemblées élues.
Les femmes seront suivies, et pour ce faire « il y aura un comité de suivi, de planification et de sensibilisation ainsi que de formation qui va accompagner ces femmes sur des thématiques jusqu’ au moment des élections », a-t-elle assuré.
M. Trah Siagbé, a par ailleurs soutenu que « les femmes évoluent dans un système et elles sont victimes de ce système », et ceux qui les victimisent, il faut les former pour changer leur vision sur le concept genre afin de donner à tous les mêmes chances.
Rapportant des dires de partis politiques, il a dit que certains avancent des arguments de « manque d’audace des femmes, d’ambition et de confiance en soi chez les femmes, qui même désignées déclinent les offres ».
La femme affiche un leadership faible face au règne patriarcal. De ce fait, étant dans un système patriarcal, où il y a la « prééminence et la domination des hommes, il faut développer la masculinité positive ».
La masculinité positive, expliquera-t-il, est la prise de conscience pour un homme de servir la cause de la femme et de la société. Elle vise à faire en sorte que tous les hommes transforment systématiquement toute leur résistance vis-à-vis de la situation des femmes.
Depuis plusieurs décennies, la Côte d’Ivoire multiplie les initiatives afin de réduire les inégalités et les disparités entre les sexes en vue de parvenir à un développement juste et équitable dans une société où les hommes et les femmes jouissent de l’égalité des chances devant les opportunités.
L’on observe une nette progression dans cette lutte pour l’égalité des chances avec la création d’un cadre favorable et l’avènement d’espaces de discussions inclusives, notamment l’existence des branches féminines dans les partis politiques (OFFPI, RFR…).
Le pays enregistre l’accession de femmes à la direction de certains partis politiques (RPC PAIX, URD, RDP) auxquels s’ajoutent, une candidature féminine à l’élection présidentielle de 2010, deux à celle de 2015 et un enregistrement record de 452 candidates aux législatives de 2021 contre 328 en 2016 et 105 en 2011.
Malgré, ces avancées, la représentativité des femmes dans les instances de prise de décision des partis politiques continue d’être un défi à relever. Les chiffres évoquent 12,59% de femmes à l’Assemblée nationale, 19,2 % au Sénat et 11,37 aux conseils municipaux.
Face aux faibles scores constatés plusieurs pays africains mutualisent leurs efforts afin de faire progresser la représentation et la participation politique des femmes et des jeunes en Afrique. Cet atelier a été organisé en collaboration avec Women political participation (WPP), dont le coordonnateur, la Sénégalaise Fatou Sarr, était présente à cette session.
Pour corriger cette disparité au plan politique en Afrique, le programme WPP en partenariat avec l’Institut Fondamental d´Afrique Noire (IFAN), le caucus des Femmes leaders du Sénégal et l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (International IDEA) a été initié dans huit pays africains.
En côte d’ivoire cette mission est conduite par la Chaire UNESCO Eau Femmes et Pouvoir de Décisions qui travaille en appui aux efforts du gouvernement pour renforcer la visibilité, la participation et le leadership des femmes en vue d’améliorer leur rôle dans la conduite des affaires publiques et privées à travers le programme Compendium des Compétences Féminines.
L’atelier a réuni une quarantaine de personnes issues des partis politiques, du secteur public, les femmes du Compendium des Compétences féminines, la Chaire UNESCO « Eau Femmes et pouvoir de Décisions » et les partenaires du Caucus des femmes leaders du Sénégal.
AP/ls/APA