Les journaux camerounais parus lundi s’étendent sur la hausse subite des produits brassicoles, intervenue en fin de semaine dernière, sans pour autant omettre la crise anglophone qui continue de se dégrader, pendant que les leaders sécessionnistes voient leur sort se compliquer devant la justice nigériane.
Sous le titre «La bière a changé de prix», Le Jour annonce la revue à la hausse, depuis vendredi, du coût de certains produits brassicoles, non sans signaler le malaise qui s’est installé depuis lors entre les consommateurs et les détaillants.
L’addition est amère et divise, renchérissent Eden, Émergence, L’Anecdote, Mutations et même le quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune. Selon ces journaux, le gouvernement, finalement pris de court par les industriels après avoir longtemps tergiversé, est obligé de convoquer d’urgence, pour ce mercredi, une réunion de concertation avec les acteurs de la filière pour éviter le pourrissement de la situation.
Les consommateurs sont en colère contre les exploitants de débits de boissons depuis le 1er mars, confirme Intégration qui s’empresse aussitôt d’expliquer l’origine de la tension : la Loi de finances 2019 a élargi le champ d’application du droit d’accises spécifique aux boissons gazeuses, sodas et autres boissons sucrées importés, réduisant du même coup de moitié l’abattement de la base d’imposition au droit d’accise des bières tirant un degré d’alcool inférieur ou égal à 5,5% pour le fixer à 10%, un mécanisme fiscal qui amène les brasseurs à procéder à un renchérissement de leurs produits.
La hausse des prix tourne autour de 50 FCFA en moyenne, malgré des contre-propositions formulées dès décembre 2018 par l’Association camerounaise des producteurs de boissons alcoolisées (Capa), explique Défis Actuels pour qui les nouvelles mesures fiscales, telles que prévues par la Loi de finances, ont un impact moyen allant de 70 à 115 FCFA par bouteille vendue autrefois à 600 FCFA.
Mieux, cette incidence financière des droits d’accises, couplée à d’autres impôts tels que la TVA (19,25%) et le précompte de 2,2%, ont un «impact total moyen qui se situe entre 85,02 et 139,66FCFA par bouteille, raisons pour lesquelles les membres de l’Association espéraient une augmentation moyenne de 100 à 150 FCFA par bouteille, sur les prix de vente pratiqués actuellement.
S’il y a des personnes que la nouvelle donne remplit de joie, ce sont bien les séparatistes d’Ambazonie, du nom de cette république fantoche anglophone, eux qui, selon The Median, se félicitent de l’augmentation du prix de la bière fabriquée par la Société anonyme des brasseries du Cameroun (Sabc), une entreprise française qu’ils considèrent comme un outil d’impérialisme de la France dans le pays.
Sauf que, s’empresse de signaler l’hebdomadaire de langue anglaise, les indépendantistes risquent de ne pas pavoiser bien longtemps : la réélection de Muhammadu Buhari, à la tête du Nigeria voisin où ils ont leurs bases arrières et qui n’est pas favorable à leurs actions, pourrait davantage leur compliquer la tâche.
Yaoundé et Abuja complotent-ils contre les sécessionnistes ? s’interroge à son tour The Post au regard de la récente actualité au Nigeria où la Cour fédérale a condamné l’État pour avoir, le 5 janvier 2018, interpellé et extradé vers le Cameroun le leader indépendantiste Sisiku Ayuk Tabe et 9 de ses lieutenants.
Pour la haute institution judiciaire, renchérit Eden, ces 10 personnes doivent non seulement être rapatriées là où elles ont été arrêtées, mais en plus l’État va devoir les dédommager pour cette déportation.
«La Haute Cour reconnaît aux leaders sécessionnistes le statut de réfugiés politiques, et leur octroie en outre un dédommagement à hauteur de plus de 8 millions FCFA par tête», prolonge Émergence, ne cachant toutefois pas son pessimisme quant à l’application de ce jugement, le gouvernement camerounais considère comme sans objet.
Sur le théâtre des opérations, soupire L’Essentiel, la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun vire au chaos : ce sont les armes qui parlent désormais et, face à l’état de terreur (assassinats, embuscades contre les forces de l’ordre, mutilations, kidnappings, sabotages, incendies) et de villes mortes qu’imposent les sécessionnistes et les irrédentistes se réclamant de l’État fantôme d’Ambazonie, l’armée camerounaise se retrouve au front d’une guerre qu’elle se voit imposée de plus en plus.
FCEB/cat/APA