Avec au moins 24% de femmes entrepreneures, contre 8% en Europe, l’Afrique est devenue en quelques années le premier continent de l’entrepreneuriat féminin, selon une étude de l’institut Roland Berger.
Au Sénégal, APA est parti à la rencontre de deux entrepreneures, Olga Afoudji et Khady Gaye, à l’occasion de la Journée des TPME, célébrée le 27 juin dernier.
Depuis six mois, la cuisine d’Olga Afoudji est devenue un véritable atelier de transformation de jus de fruits locaux. Bissap rouge, blanc, tamarin, pain de singe, gingembre, mangues… Sous les mains d’Olga et de ses deux salariés, ces fruits produits au Sénégal deviennent liquides, pour finir dans des bouteilles dédiées à la vente au rez-de-chaussée de chez elle, où elle a aménagé son échoppe.
Difficile à imaginer, mais il y a quelques mois à peine, Olga était assistante administrative et financière dans des agences de l’ONU et autres grandes Organisations non gouvernemental (ONG). « Cette entreprise a changé ma vie. Aujourd’hui je suis entrepreneure, je ne suis plus une salariée lambda. Je gère mes journées différemment. Je ne travaille plus dans un bureau fermé. Je peux aller et venir, et surtout l’entrepreneuriat me permet de concilier travail et famille », dit Olga, Sénégalaise d’origine béninoise, mère de deux grands enfants.
Khady Gaye, elle aussi, est maman. Revenue des Etats-Unis en 2013 après un séjour de plus de 10 ans, elle a voulu quitter le monde salarial, où elle exerçait comme comptable, pour gagner en liberté. « Avec les heures d’allaitement, et mes nouvelles responsabilités en tant que maman, ce n’était plus évident de travailler à heures fixes. L’entreprise m’a tout apporté : la liberté dans mes mouvements, la gestion de mon temps. Ça n’a pas de prix ».
C’est une expérience personnelle qui a donné à Khady l’idée de départ de son nouveau business : son père, amateur de café Touba (un café très populaire au Sénégal, aromatisé au +diar+ (poivre de Guinée) et au clou de girofle, ramené dans le pays par Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké de son retour d’exil du Gabon), est un jour tombé gravement malade en buvant ce café dans la rue. Khady a alors décidé de créer son propre café Touba, selon des normes d’hygiène et de traçabilité strictes.
Un café dont les graines sont importées du Cameroun, le Sénégal n’étant pas producteur, mais torréfié à Dakar. « Je me dis qu’il est temps qu’on transforme chez nous, nous avons les ressources », estime Khady, ajoutant : « Il n’y aucune raison pour que d’autres transforment et nous revendent ensuite ».
Selon une étude de l’institut Roland Berger datant de 2016, l’entrepreneuriat féminin gagne du terrain. Les Africaines détiennent même le record du monde. Elles sont au moins 24 % de femmes entrepreneures, contre 17% en Amérique latine, 12% en Amérique du Nord et seulement 8% en Europe et en Asie centrale.
« Etre femme entrepreneure au Sénégal, c’est amusant », témoigne Khady Gaye. « Il y a vingt millions d’opportunités, beaucoup de choses à faire. C’est un super challenge ! En revanche, être femme, dans tous les domaines, c’est plus difficile. On a vraiment besoin du soutien de sa famille », poursuit notre hôte qui dit se battre pour trouver des fonds afin de financer sa propre machine de torréfaction.
Quant à Olga Afoudji, qui elle aussi a démarré son entreprise sur fonds propres, cherche à passer à la vitesse supérieure. Elle tente pour cela de décrocher un prêt. « C’est vrai que cela pourrait faire peur de lancer son entreprise. Mais quand on croit en son leadership, et qu’on se convainc que son business ne peut que marcher, on parvient à dépasser cette peur », confie-t-elle avec un petit sourire.
OKF/te/APA