Dans un entretien avec APA, le ministre malien des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, dresse l’état des derniers développements de la crise au Sahel et explique pourquoi le gouvernement de Bamako n’est plus opposé à une discussion avec les jihadistes.
Lors du Sommet de l’Union Africaine à Addis-Abeba, en Éthiopie, tenu les 9 et 10 février, le président malien Ibrahim Boubacar Keïta a affirmé que le Sahel constitue une digue contre la menace jihadiste qu’il faut absolument protéger. A-t-il a été entendu ?
Ce sommet a été un moment important de prise de conscience de la gravité de la situation sécuritaire au Sahel, de la gravité de la menace qu’elle représente pour le continent et pour le reste du monde. En première ligne, les pays du Sahel sont dans la posture de la digue qui ne doit pas céder.
Beaucoup d’intervenants ont déploré le manque de solidarité entre Africains face à la menace jihadiste. Avez-vous ressenti une détermination des Africains à aider les pays du Sahel pour combattre la menace ?
Je vous ai parlé d’une prise de conscience. De toutes les déclarations des leaders, il est apparu que l’Afrique ne veut plus être désormais une spectatrice. Elle veut jouer les premiers rôles. Il reste à passer aux actes. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) a donné le ton. Le reste du continent suivra, je l’espère, très bientôt.
Lors du sommet de Pau (France) qui a réuni en janvier dernier, autour du président français Emmanuel Macron, les chefs d’Etat du G5 Sahel, plusieurs mesures ont été annoncées. Avez-vous l’impression qu’il y a une réelle volonté des pays du Sahel de les appliquer ?
Pau a été un lieu d’engagements communs du Sahel et de la France. Un mois après, tout le monde peut voir que nous sommes entrés dans le temps des actes concrets. Le dernier exemple le plus significatif de cette nouvelle étape est l’entrée, le 13 février, des premières unités de la nouvelle armée malienne dans la ville de Kidal. C’est un pas important du processus de réunification et de stabilisation du Mali.
Qu’est-ce qui empêche, selon vous, les parties signataires à appliquer l’accord de paix d’Alger signé en 2015 ?
Cette question relève du passé maintenant. Le déploiement de nos forces armées reconstituées à Kidal est la preuve de la nouvelle impulsion donnée au processus d’Alger.
Certains pays africains réclament leur entrée dans le G5 Sahel, d’autres souhaitent un cadre plus large. Êtes-vous d’accord ?
La coalition pour le Sahel créée à Pau, le 13 janvier, est ouverte à tous ceux qui veulent apporter leur contribution à la lutte contre le fléau du terrorisme.
Le président Keïta, qui était opposé à toute idée de dialogue avec les jihadistes, a récemment changé d’avis. Pourquoi ?
Explorer les voies du dialogue avec les jihadistes maliens est une recommandation des forces vives du pays réunies en congrès du 14 au 22 décembre 2019. C’est une recommandation qui s’impose à tous. Le président de la République retiendra les meilleures options pour apaiser le pays et pour y restaurer la concorde.
En résumé, il ne faut négliger aucune piste susceptible de nous conduire vers l’apaisement, la paix et la concorde.
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