Des citoyens burkinabè quoique approuvant l’idée des autorités du pays de recruter des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) dans certaines zones du pays pour lutter contre le terrorisme, préconisent la prudence et surtout la vigilance dans l’application de la mesure.
Plus de deux semaines après l’adoption de la loi à l’Assemblée nationale, les commentaires continuent à propos de l’opportunité qu’offre cette mesure dont le but principal est de lutter efficacement contre le terrorisme auquel le Burkina est confronté.
L’économiste Yiriyibi Bambio, enseignant à l’Université de Ouagadougou, trouve que «la mesure en elle-même est très bonne et louable», ajoutant que «c’est pourquoi la loi donnant quitus au gouvernement de lancer le processus a été votée à l’unanimité des députés de l’Assemblée nationale».
A l’instar de M. Bambio, ils sont nombreux, les citoyens burkinabè qui saluent cette loi et disent attendre impatiemment son application. Cependant, la plupart des personnes qui s’expriment sur le sujet, émettent aussi des réserves.
«Même si la mesure n’est dénuée d’avantages, il faut craindre des dérapages lors de la mise en œuvre», fait remarquer Yiriyibi Bambio, avant d’expliquer que si l’on n’y prend garde, les volontaires recrutés pourraient se transformer en milices.
Il souligne également que des terroristes pourraient se faire passer pour des volontaires et se faire recruter si des failles existent dans le processus de recrutement.
C’est à juste titre que l’universitaire suggère que ce soient des professionnels rompus à la tâche qui opèrent les enquêtes de moralité devant aboutir au recrutement de chaque VDP.
Le même point de vue est partagé par l’artiste musicien, activiste de la société civile, Oscibi Johann qui pense que l’on doit éviter les erreurs commises avec les CDR (Comité de défense de la Révolution, mis en place lors du pouvoir du capitaine Thomas Sankara, Ndlr).
L’artiste-musicien-activiste trouve que l’accent devrait être mis sur la formation à dispenser à l’endroit des VDP avant leur intégration au rang des recrus.
A ce propos, Yiriyibi Bambio émet des réserves concernant les deux semaines qui devraient être consacrées à la formation de chacun des volontaires.
«Je ne vois pas comment pourra-t-on former (en théorie et en pratique) une personne qui plus est sensée lutter contre des terroristes et doit manier une arme, fusse-t-elle légère», argumente-t-il.
C’est pourquoi l’enseignant préfère que les volontaires jouent essentiellement le rôle d’informateurs des Forces de défense et de sécurité (FDS).
L’article 2 de la loi relatif aux dispositions générales définit le Volontaire pour la défense de la patrie (VDP) comme «une personne de nationalité burkinabè, auxiliaire des Forces de défense et de Sécurité (FDS), servant de façon volontaire les intérêts sécuritaires de son village ou de son secteur de résidence, en vertu d’un contrat signé entre le Volontaire et l’Etat».
La loi précise que la mission du VDP est de contribuer au besoin, par la force des Armées, à la défense des personnes et des biens de son village ou de son secteur de résidence.
Selon l’article 3 et autres, la tâche du futur auxiliaire des FDS exige en toute circonstance «patriotisme, loyauté, discipline, disponibilité, neutralité, intégrité et esprit de sacrifice pouvant aller au sacrifice suprême».
Quant à l’article 5 dudit projet de loi, il stipule que «le recrutement des VDP se fait au niveau du village ou de son secteur de résidence sur la base de volontariat, subordonné à l’approbation des populations locales, en Assemblée générale».
A cela, il faut ajouter le fait que le VDP recevra une formation de 14 jours axée sur la manipulation des armes, la discipline et d’un équipement spécifique.
Et de mentionner que l’auxiliaire des FDS ou VDP peut perdre sa qualité de volontaire, sur la base de la démission, de la résiliation du contrat, de l’absence prolongée de plus de 30 jours et du non renouvellement du contrat ou de décès.
Il ressort du texte que les volontaires ne seront pas dotés d’uniformes et que leur opérationnalisation interviendra avec l’entrée en vigueur de la loi au Burkina Faso.
Le président du Faso, Roch Kaboré, lors de son discours à la Nation du 7 novembre 2019, au lendemain de l’attaque terroriste contre un convoi d’une société minière ayant fait une quarantaine de morts à l’Est du pays, avait lancé un appel pour recruter des volontaires afin de défendre la patrie en proie au terrorisme.
Après le vote du projet de loi, le 21 janvier dernier, la signature d’un décret est nécessaire pour l’opérationnalisation de la mesure.
ALK/te/APA