Le général Ahmed Gaïd Salah, un des caciques de l’armée algérienne, a incarné jusqu’à sa mort survenue ce lundi des suites d’une crise cardiaque à l’âge de 79 ans, la mainmise du pouvoir kaki sur le pays.
Dernier exemple de « faits d’armes » du Général : il a pris en avril 2019 la place d’Abdelaziz Bouteflika, chassé du pouvoir par la rue, pour s’investir corps et âme à l’organisation de la présidentielle du 12 décembre ayant abouti à la victoire au premier tour d’Abdelmadjid Tebboune.
« Mission accomplie ! Chapeau bas Général ». Telle est l’exclamation pleine d’admiration d’un journaliste sénégalais à l’annonce de sa mort. Il est vrai que personne ne s’attendait à voir de sitôt disparaitre de la scène politique algérienne le désormais défunt vice-ministre de la Défense et chef d’Etat-major de l’Armée. Même si cet homme moustachu au visage pâle avait l’habitude de cacher ses quelques rides et son pénétrant regard derrière des verres correcteurs.
Il y a quatre jours Gaïd Salah assistait devant un parterre de dignitaires et hauts gradés de l’armée à l’investiture de l’ex-Premier ministre Tebboune, 74 ans, élu au premier tour du scrutin contesté du 12 décembre avec 58,13 % des suffrages.
Malgré l’élection du nouveau président de la République, beaucoup continuaient de considérer Gaïd Salah, figure emblématique du « système » en Algérie, comme le véritable homme fort du pays.
Assumant ce choix, il s’est mis en avant depuis avril dernier à travers le haut commandement militaire, bravant le « Hirak » qui inlassablement organise les manifestations pacifiques, chaque mardi et vendredi.
Après avoir poussé à la démission Bouteflika, candidat à un cinquième mandat, le « hirak » a voulu réserver le même sort à tous les dignitaires de l’ex-régime, dont sont issus les cinq candidats de la dernière présidentielle. Malgré la menace pesant sur la tenue du scrutin, Ahmed Gaïd Salah a su faire face en organisant le scrutin boycotté par 60% des inscrits.
Influent Général
Dans une précédente interview avec APA, Kader Abdelrahim, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et spécialiste du Maghreb avait vu juste en soutenant que l’élection présidentielle aurait lieu « parce que le régime et principalement son chef d’état-major, le vice-ministre de la Défense, Gaïd Salah, n’a pas face à lui une opposition structurée et organisée ».
Suffisant ainsi pour se faire une idée de la toute-puissance de cet homme, propulsé chef de l’état-major en 2004 par l’ancien président Bouteflika dont il faisait partie du pré carré de ses fidèles.
Ex-maquisard de l’Armée de libération nationale (ALN), Gaïd Salah a, en 2014, joué de son influence pour baliser la voie d’un quatrième mandat à Bouteflika, pourtant victime d’un AVC depuis avril 2013. Toujours fidèle à son mentor, Gaïd Salah l’a ensuite adoubé pour un cinquième mandat avant de changer de fusil d’épaule, un mois après le début de la révolution de rue du 22 février 2019.
Parallèlement à son cheminement aux côtés de Bouteflika, il a eu un riche parcours militaire jalonné par le grade de Commandant de groupe d’artillerie, puis de Commandant de brigade avant celui de général major en 1993. Devenu Commandant des forces terrestres l’année suivante, il est nommé le 3 août 2004 chef d’Etat-major de l’Armée nationale populaire. Il lui faudra attendre 2006 pour être promu général de corps d’armée et enfin vice-ministre de la Défense le 11 septembre 2013.
Après l’avoir qualifié de « moudjahid (martyr) », le communiqué de la présidence de la République signé du chef suprême des forces armées, Abdelmadjid Tebboune, a pour marquer l’évènement « décrété un deuil national de trois jours et de sept jours pour l’institution de l’Armée nationale populaire (ANP ».
Dans la même foulée, Gaïd Salah est remplacé par le général-major Said Chengriha, Commandant des forces terrestres, au poste de chef d’état-major par intérim de l’Armée nationale populaire (ANP).
ODL/cat/APA