La logique répressive contre des dirigeants et manifestants du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC, opposition) continue d’alimenter les colonnes des journaux camerounais parus jeudi, à côté d’un front de l’économie dont on ne peut pas affirmer qu’il rassure.
L’image de l’opposant Maurice Kamto, arrivé 2ème à l’issue de la présidentielle d’octobre 2018 derrière le chef de l’État sortant, Paul Biya, trône à côté d’un long et unique titre du quotidien à capitaux privés Le Jour, qui résume ainsi la litanie des accusations portées contre ce leader, arrêté lundi dans la métropole économique, Douala en compagnie de cadres et alliés, puis conduit sous bonne garde à la police judiciaire (PJ) dans la capitale, Yaoundé.
Attroupement, insurrection, rébellion en groupe, hostilité contre la patrie, trouble à l’ordre public, association de malfaiteurs, incitation à l’insurrection sont, entre autres, les faits dont il doit répondre, lui et plusieurs dizaines de militants du MRC, des journalistes et même des badauds ayant été interpellés massivement et menés dans trois centres de détention dans la ville.
Ce sont au total huit charges qui ont été retenues contre le patron du MRC, reprend Émergence, rappelant que l’opposant reste serein dans sa cellule, rejetant par contre les exactions commises par des manifestants samedi dernier dans les ambassades du Cameroun en Allemagne et en France
C’est l’art sublimé de poser un cautère sur une jambe de bois, décrit le reporter de Le Jour en guise de mise en scène : depuis mardi aux premières heures du jour, un cordon de sécurité des plus costauds barre les entrées nord et sud du bâtiment de la PJ, un camion antiémeute de la gendarmerie, des policiers, les uns engoncés dans leur armure pour le maintien de l’ordre, les autres dans leur gilets pare-balles, arme au poing, chargeur engagé, le doigt caressant la détente…
C’est «le choc des extrêmes», constate pour sa part Mutations : entre déclarations, provocations, dénis, casses, interpellations et détentions, le gouvernement et le MRC durcissent leurs positions et, en dépit des appels à l’apaisement, le chemin de l’impasse semble l’option prise par les protagonistes.
Entre «marches blanches» du MRC et «marches noires» du pouvoir, c’est désormais la démocratie du chaos, se désole Ouest-Échos, estimant également que l’arrestation de Maurice Kamto est de nature à précipiter le régime Biya dans un cycle de violences tous azimuts.
Les juristes épluchent le Code pénal, relève Défis Actuels, à la recherche de la «faute lourde» qui aurait valu au président du MRC et à ses partisans leur arrestation, le 28 janvier dernier, voire plus tôt : «Si pour l’heure aucun chef d’inculpation n’a encore officiellement été retenu contre Maurice Kamto et ses camarades, l’ancien ministre délégué à la Justice pourrait être victime du fourre-tout judiciaire de ‘’trouble à l’ordre public’’. L’homme, qui connaît les lois du Cameroun sur le bout des doigts, pourrait entamer une bataille judiciaire dont l’issue reste imprévisible.»
Et, ironise The Guardian Post, pendant qu’il réprime les marches pacifiques de l’opposition, le pouvoir Biya autorise des manifestations en sa faveur, à Yaoundé, supposées défendre la paix sociale au nom du favoritisme.
C’est le moment, pour The Post, de faire le tour des réactions de cette crise politique à l’international, globalement pour l’apaisement, l’ouverture d’un dialogue inclusif, la libération des personnes interpellées ainsi que la condamnation sans appel du saccage des ambassades du Cameroun à Berlin et Paris.
À propos de l’arrestation de Maurice Kamto et de ses sympathisants, et à la suite de ces appels à l’apaisement, L’Épervier décrète que «Yaoundé ne cèdera pas aux pressions extérieures», ni au tapage encore moins au chantage.
Et le moins que l’on puisse en penser et qu’il y a également surchauffe sur le front économie, le ministre des Finances étant, selon Baromètre Communautaire, le premier à monter au créneau pour crier à la fin de la récréation.
Sous le titre «Louis Paul Motaze veut plus de pouvoir», l’hebdomadaire révèle que ce membre du gouvernement, convaincu que la mise en œuvre de la politique économique du Cameroun ne peut passer que si le département dont il a la charge joue un rôle de premier plan, tire son constat de la situation actuelle où chaque chef de ministère définit ses priorités, et fait ce qu’il veut du budget de l’État.
Il nous faut changer de paradigme, confesse, dans Défis Actuels, le ministre de l’Économie, du Plan et de l’Aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey : les attentes des populations ne sont pas encore satisfaites, même si la croissance demeure résiliente, et cela devrait se faire ressentir dans leur vécu quotidien.
Cela passe, estime-t-il, par des investissements structurants réalisés dans les délais impartis, aux coûts les plus abordables et à la qualité requise : «Tout ceci ne peut être possible que si nous avons au niveau de la gouvernance les différentes mesures qui s’imposent. Il s’agit d’une gouvernance de célérité, d’efficacité, de facilitation de l’amélioration de la compétitivité. En le faisant, nous comptons nous appuyer sur le soutien de nos partenaires techniques et financiers au développement.»
FCEB/cat/APA