Agacé par la montée du sentiment anti-français dans les pays du Sahel, le chef de l’Etat français, Emmanuel Macron avait annoncé, le 04 décembre dernier, une rencontre dans la ville de Pau avec ses homologues sahéliens pour « clarifier » leur position quant à la présence militaire française dans la région. Finalement reporté, le sommet s’est ouvert lundi 13 janvier 2020.
« J’attends d’eux qu’ils clarifient et formalisent leur demande à l’égard de la France et de la communauté internationale. Souhaitent-ils notre présence ? Ont-ils besoin de nous ? Je veux des réponses claires et assumées sur ces questions », avait lancé, le ton ferme, le 4 décembre dernier, le président français à l’occasion du sommet de l’OTAN qui se tenait à Londres.
La rencontre de Pau a pour objectif principal de « redéfinir plus clairement les objectifs militaires, politiques et de développement » de la lutte commune contre les groupes djihadistes, selon le président Emmanuel Macron.
Pas plus tard que le 10 janvier dernier, une manifestation contre la présence des forces étrangères, et notamment françaises, au Mali a réuni, selon les organisateurs, au moins un millier de personnes à la place de l’Indépendance de Bamako.
A lire aussi: Sahel: « Il faut laisser l’initiative aux Sahéliens » (expert)
« Malgré cette présence massive des plus grandes armées du monde, les groupes terroristes continuent à sévir et montent même en puissance. Il faut donc se méfier de ces pyromanes nocturnes qui, dès le lever du jour, se transforment subitement en pompiers. Ces puissances étrangères utilisent le terrorisme pour contrôler les immenses richesses de la région », expliquait, ce jour, un porte-parole des manifestants, Gabin Korbéogo, cité par l’AFP.
Cet état d’esprit de Korbéogo est largement partagé au sein des manifestants, comme en témoignent les pancartes qu’ils brandissaient et où on pouvait lire : « Le gouvernement français est un frein à notre développement. » « À bas la France, Barkhane doit partir. » « La France dehors, les FAMa [Forces armées maliennes] peuvent sécuriser le Mali ».
Les réseaux sociaux, principal terrain d’expression des opposants aux forces étrangères
Face à la recrudescence des attaques terroristes, les thèses impliquant la France inondent la toile notamment Facebook et WhatsApp où les vidéos montrant l’assaut des djihadistes ou les dégâts qu’ils ont causés font des millions de vues.
Mais pour le président nigérien, Mahamadou Issoufou, interrogé par Radio France international (RFI), ceux qui s’expriment sur les réseaux sociaux ou dans la rue ne constituent pas la base populaire. « Ils sont très, très minoritaires. Je ne vois pas de foules en train de contester les alliances que l’on veut mettre en place pour lutter contre la menace terroriste, qui est une menace planétaire », avait-il précisé.
A lire aussi: Sahel: une année noire pour les armées locales
Pour le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, l’engagement des forces étrangères aux côtés de celles du Sahel « ne saurait être confondu avec une minorité d’activistes, de francs-tireurs ou de forces centrifuges qui cherchent à faire feu de tout bois, y compris le jeu des terroristes ».
Se disant « convaincu » que les Maliens éprouvent majoritairement un « sentiment de gratitude » envers les pays alliés, il a qualifié, lors de son discours à la nation du 31 décembre dernier, de « décisive » la rencontre Pau, arguant qu’elle sera l’occasion « de mettre sur la table toutes les questions, tous les griefs, toutes les solutions ».
A en croire le ministre nigérien des Affaires étrangères, Kalla Ankourao, interrogé par RFI, « Il y aura, (à Pau), une déclaration commune entre les chefs d’État du G5 Sahel et la France pour réaffirmer la nécessité de poursuivre cette lutte-là en commun et même d’élargir les forces qui devraient participer à cette lutte contre le terrorisme ».
« D’après tout ce que nous avons fait depuis quatre semaines, les choses ont été bien clarifiées. Nous savons désormais les décisions que nous allons prendre à Pau et, croyez-moi, les choses ne seront plus comme avant. Les difficultés vont être derrière nous, surtout qu’il y a des repères, un agenda. Il y a un tableau de bord pour mettre en œuvre tout cela », a ajouté Kalla Ankourao.
ARD/te/APA