La fin du conflit au nord du Mali nécessite l’implication des combattants dont les visées ne se recoupent pas toujours avec celles des chefs jihadistes, dissèque Ibrahim Maïga, chercheur à l’Institut d’études de sécurité (ISS) basé à Bamako.
« On a des groupes segmentés dont les intérêts des leaders ne coïncident pas nécessairement avec ceux du niveau intermédiaire, encore moins de la base combattante », développe M. Maïga, spécialiste des questions de paix et de sécurité au Sahel.
Pour s’en convaincre, cet expert relève que dans « les mouvements jihadistes, certains membres évoquent des raisons de vengeance, de protection d’eux-mêmes, de leur famille, de leur communauté ou de leur bétail. Parfois, c’est pour l’amélioration de leur condition économique ».
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L’appel au dialogue du président malien Ibrahim Boubacar Keïta a trouvé un écho favorable auprès d’Iyad Ag-Ghali, le chef du Groupe de soutien à l’Islam et aux Musulmans (Gsim). Mais ce dernier, dans une lettre rendue publique dimanche 8 mars puis certifiée le lendemain par le Centre américain de surveillance des sites jihadistes (SITE), a demandé le retrait des troupes de l’opération Barkhane mais aussi de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma).
« Le communiqué est plus politique que religieux. On a la preuve supplémentaire qu’Iyad Ag-Ghali est un animal politique. L’essentiel de son discours s’articule autour de la présence au Mali des forces étrangères et des manifestations ayant eu lieu pour demander leur départ. Il souhaite continuer à jouer un rôle de premier plan que ça soit dans le cadre d’une négociation ou pas », analyse Ibrahim Maïga, titulaire d’un Master en droit international et transnational de l’université de Laval (Canada).
Poursuivant, le chercheur à l’Institut d’études de sécurité (ISS) soutient que, pour le moment, « les autorités maliennes ne souhaitent pas un retrait des forces étrangères. Bamako veut plutôt une amélioration de leur efficacité voire une révision de leur mandat » parce que le départ précipité des éléments de Barkhane et de la mission onusienne « pourrait être dommageable» pour l’Etat qui peine à imposer son autorité dans certaines parties du pays.
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Jugeant que les revendications de cette figure du jihadisme au Sahel « ne sont pas nouvelles », il décèle un piège que doit impérativement éviter le gouvernement malien. « Le dialogue, tel qu’il est aujourd’hui présenté dans ses grandes lignes, est souvent assimilé à un processus de discussions entre les leaders jihadistes et les représentants de l’Etat », note-t-il.
Ibrahim Maïga défend l’idée selon laquelle, les négociations doivent être plus larges : « Il faut que le dialogue soit plus démocratique et plus décentralisé».
ID/te/APA