A N’Djamena, la capitale tchadienne, la tentative d’arrestation au char d’assaut de l’opposant Yaya Dillo a fait plusieurs morts.
La scène de l’entreprise d’interpellation est digne d’un film hollywoodien. Pour mettre la main sur Yaya Dillo, l’artillerie lourde a été utilisée le dimanche 28 février dernier par les policiers. Véhicules blindés, camionnettes… ont quadrillé le quartier où vit l’ex-rebelle. Mais ce dernier, avec ses proches, a opposé une farouche résistance. Bilan officiel : deux morts et cinq blessés dont trois parmi les forces de l’ordre.
Dans un communiqué, Cherif Mahamat Zene, ministre de la Communication, a souligné que « les forces de défense et de sécurité, (qui ont) essuyé des tirs d’armes provenant du domicile où il s’est retranché, n’ont pas eu d’autres choix que de riposter en légitime défense ». Poursuivant, le Porte-parole du gouvernement a condamné « avec la dernière énergie cette rébellion armée au cœur de la capitale. (Ce n’est) qu’une tentative de déstabilisation des institutions de l’Etat fomentée de longue date ».
Selon la version de Yaya Dillo, qui a pu s’échapper, il y aurait plutôt cinq personnes tuées dont sa mère et son fils. Le candidat du Parti Socialiste sans Frontières (PSF), à l’élection présidentielle du 11 avril prochain, est sous le coup de deux mandats d’arrêt résultant d’une plainte déposée en mai 2020 par Hinda Déby Itno, la première dame du Tchad.
En effet, M. Dillo a dénoncé l’implication de la fondation Grand Cœur de l’épouse du président Idriss Déby Itno dans la gestion des fonds destinés à la lutte contre le nouveau coronavirus. Après quoi, il a été poursuivi pour « diffamation et injures ».
C’est le début des ennuis pour ce membre de la communauté Zaghawa et neveu du chef de l’Etat tchadien devenu maréchal. Car, le 6 juillet 2020, l’ancien chef du groupe rebelle Socle pour le changement, l’unité et la démocratie (Scud), ayant tenté de renverser par les armes le pouvoir d’Idriss Déby, a perdu son poste d’ambassadeur du Tchad auprès de la Commission économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) pour « manque de neutralité et violation du droit de réserve ».
A la faveur de la signature d’un accord de paix avec N’Djamena, Yaya Dillo a auparavant été nommé Secrétaire d’Etat, ministre des Mines et de l’Énergie puis Conseiller à la présidence.
Convaincu que « l’heure du changement a sonné », le porte-étendard du PSF a déjà reçu, selon la presse locale, le soutien pour la présidentielle de treize partis de l’opposition réunis dans le Front Nouveau pour le Changement (FNC). Yaya Dillo, qui craint pour sa vie, a lancé à l’endroit de ses concitoyens un appel à l’insurrection.
En tout cas, ces évènements tragiques ont déjà poussé le leader de l’opposition, Saleh Kebzabo, à se retirer de la course au palais : « Le martyre d’une vielle dame de 80 ans et de son petit-fils de 11 ans viennent de me renforcer dans cette conviction. J’ai décidé de suspendre ma participation au processus électoral », a-t-il tweeté lundi. De son côté, Succès Masra, candidat à la présidentielle, a déclaré que le président de la République « doit démissionner immédiatement ».
Idriss Déby Itno (68 ans), qui dirige d’une main de fer le Tchad depuis 30 ans, brigue un sixième mandat le 11 avril prochain. Les résultats définitifs du scrutin devraient être proclamés le 15 mai et un éventuel second tour est prévu le 23 mai.
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