La démission de Firmin Ngrebada, sur fond de rivalité franco-russe, intervient six mois après la réélection du président Faustin Archange Touadéra.
Éminence grise du régime et ancien directeur de cabinet de l’actuel président centrafricain, Firmin Ngrebada pourrait toutefois être reconduit dans ses fonctions selon des sources à la Présidence de la République. Sa nomination à la Primature, il y a deux ans, est le fruit des accords de paix signés à Khartoum, au Soudan, en février 2019.
M. Ngrebada, qui fut directeur de campagne de Faustin Archange Touadéra à l’élection présidentielle de 2016, a été maintenu à la Primature après la réélection du président sortant en décembre dernier. Touadéra a été déclaré vainqueur du scrutin avec 53,16 % des suffrages. Mais selon l’opposition, ce vote, auquel moins d’un électeur sur trois a pu participer, est émaillé de « fraudes ».
Dans sa gouvernance, le chef de l’Etat centrafricain fait notamment face à la Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC). Des groupes armés qui voulaient renverser son régime. Depuis 2013, la Centrafrique est instable. Elle avait basculé dans une guerre civile née de l’antagonisme entre deux milices : la Seleka à majorité musulmane et les anti-balaka pour lesquels luttent chrétiens et animistes. Catherine Samba-Panza, en tant que présidente de la transition, a essayé de janvier 2014 à mars 2016 de tourner cette page sombre de l’histoire de la République centrafricaine. Cinq ans après, le processus est inachevé.
Lutte d’influence
Pour résister aux assauts des groupes armés, Faustin Archange Touadéra bénéficie du soutien de 12.000 Casques bleus de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en Centrafrique (Minusca). Aidé aussi par des militaires rwandais et des paramilitaires russes, le président a pu inverser le rapport de force sur le terrain. La Russie concurrence la France, l’ancienne puissance coloniale. L’énorme richesse du sous-sol centrafricain en cuivre, diamant, or, minerai de fer, manganèse, uranium… aiguise les appétits.
Le Kremlin a d’ailleurs multiplié ses investissements dans le secteur minier et dans la coopération militaire. De son côté, Paris a gelé son aide budgétaire et suspendu sa coopération militaire avec la Centrafrique jugée « complice » d’une campagne antifrançaise téléguidée par la Russie.
Une semaine seulement avant sa démission, le Premier ministre Firmin Ngrebada s’est rendu à Saint-Pétersbourg, en Russie, pour capter davantage d’investissements dans son pays. En Centrafrique, tout est urgence. Le Programme alimentaire mondial (Pam) y a recensé 630.000 personnes vivant dans une extrême pauvreté qui nécessite une aide d’urgence. Faute de quoi, elles vont « retirer leurs enfants de l’école ou recourir à la mendicité ».
CD/id/APA