Les activités ont repris calmement ce vendredi à N’Djamena, secoué la veille par une attaque du palais présidentiel.
Commerces, écoles, administration, entreprises ont ouvert leurs portes, à la suite de l’assurance donnée par le gouvernement de la maîtrise de la situation, au lendemain des incidents dans la capitale tchadienne.
Dans la soirée du 8 janvier, la psychose a gagné N’Djamena. Un groupe de jeunes non identifiés a attaqué le palais présidentiel à l’aide d’armes blanches, tuant deux gardes républicains et blessant deux autres. La réplique des militaires a été foudroyante : 18 des 24 assaillants ont été tués sur le coup.
« C’est du jamais vu, attaquer la Présidence avec des armes blanches », s’exclame Théophile Madjiadoum, un étudiant rencontré dans les locaux des facultés d’Ardep-djoumbal à N’Djamena.
Condamnations et inquiétudes
Des N’Djaménois, citoyen lambda, politicien, leader de la société, ont vivement condamné ces actes de violence. Tous appellent à la culture de la paix, au dialogue et au recours à des moyens démocratiques pour conquérir le pouvoir.
« Nous sommes aujourd’hui à l’ère du numérique et il y a beaucoup d’autres moyens légaux pour nous faire entendre. Cette culture de la violence ne reflète pas la génération que nous sommes », s’emporte Mbairamadji Désiré, président de l’Association des jeunes arcs-en-ciel pour la stabilité sociale en Afrique (AJASSA).
Même son de cloche du côté du Parlement des jeunes du Tchad qui condamne un acte insensé. « Il faut être un jeune inconscient pour attaquer le symbole de notre souveraineté. Notre pays a trop souffert de la violence, il faut que ça s’arrête », martèle son président Djamouss Bichara Béchir.
Au-delà des condamnations de l’attaque, des inquiétudes sont exprimées. Les éléments de langage utilisés par le porte-parole du gouvernement, Abderaman Koulamallah ont suscité une vague de critiques.
« Même dans des situations pareilles, on arrive à étiqueter les gens en Nord-Sud. Venant d’un gouvernement qui n’a de cesse appeler au vivre-ensemble, c’est déplorable », regrette un membre de la société civile.
Dans les quartiers indexés, la peur y est déjà palpable. « Notre seule inquiétude est l’après évènement. Parce que là le porte-parole du gouvernement a présenté les assaillants comme venant d’un quartier sud de N’Djamena. Alors là, j’ai bien peur que l’armée se déverse vers nos quartiers pour nous malmener », confie un jeune habitant le quartier Abena dans le 7e arrondissement.
« Il faut arrêter de présenter les gens du sud comme ceux qui veulent déstabiliser le pouvoir de Mahamat Idriss Déby », s’emporte un autre. Il cite les évènements du 20 octobre 2022 où le gouvernement a présenté les manifestants comme des insurgés et l’arrestation en 2023 d’un groupe de jeunes à Walia accusés de préparer une insurrection.
Nonobstant ces critiques, les Tchadiens de tout bord appellent à renoncer à la violence. « Aujourd’hui, plus que jamais, il est impératif que nous mettions de côté nos divergences, nos désaccords, et nos différences. La sécurité et la paix de notre pays doivent être notre priorité absolue, car elles transcendent tout. Rien sur cette terre n’a plus de valeur que la paix », a tranché Abdellati Mahamat Ibet, journaliste de son état.
Une deuxième nuit vient de tomber sur N’Djamena. L’ambiance a repris sur les points chauds de la capitale. Aucun dispositif sécuritaire particulier n’est constaté en ville ; même devant la Présidence où le passage est accessible. Sur les grands carrefours, aucune fouille n’est organisée témoignant de la maîtrise de la situation tant clamée par le gouvernement.
ARD/ard/Sf/ac/APA