Le projet vise à améliorer le statut économique des femmes engagées dans la riziculture et les entreprises rurales dans quatre pays ouest-africains.
L’Afrique a tiré beaucoup de leçons de la survenue de la Covid-19 et la guerre en Ukraine. Ces deux crises ont amené plusieurs experts à mettre en doute les capacités agricoles du continent qui dépend le plus souvent des importations alimentaires pour nourrir ses populations. Pour ne plus revivre ces mésaventures qui menacent la sécurité alimentaire de plusieurs millions de personnes, de nombreux pays, en Afrique de l’ouest surtout, sont décidés à conquérir leur souveraineté alimentaire.
C’est dans ce sens d’ailleurs que le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a lancé jeudi 7 décembre à Dakar le programme Renforcer les petites et moyennes entreprises d’Afrique de l’Ouest dans les chaines de valeur du riz (Ewasme). L’initiative, dont les objectifs principaux sont d’autonomiser les femmes et renforcer les filières locales, est mise en œuvre en Guinée, au Niger, au Sénégal et en Sierra Leone en collaboration avec la Banque islamique de développement (BID).
« Au-delà des justifications économiques, ce projet a une justification humanitaire », souligne d’emblée le coordonnateur du PNUD en Afrique de l’ouest et du centre, Njoya Tikum. Alors que « le riz fait partie de notre culture » africaine, le Camerounais rappelle que le marché du riz représente 300 milliards de dollars là où la part de l’Afrique se situe à dix milliards de ce montant en termes de quantité importée dans cette denrée. La solution pour « arrêter ou réduire » cette dépendance est donc de « créer une chaîne de valeur » autour de la filière rizicole en permettant notamment aux « ménages de pouvoir produire par eux-mêmes », préconise-t-il
Lancé en présence du ministre de l’Agriculture de la Sierra Leone, Henry Musa Kpaka, l’Ewasme est expérimenté sur une période de cinq ans (2022-2027) dans une initiative globale qui a pour but de réduire la pauvreté, renforcer la sécurité alimentaire et autonomiser les femmes. Le projet se concentrera sur le renforcement des capacités de post-production d’au moins mille entreprises dirigées par des femmes dans les filières locales de riz.
Généralement en Afrique, « les entreprises autour des chaînes de production n’ont pas suffisamment de forces » pour rivaliser avec les grands producteurs étrangers qui exportent leurs céréales sur le continent, déplore M. Kpaka. Dans son pays, il souligne que le président Julius Maada Bio a fait de l’agriculture une « préoccupation » majeure. C’est pourquoi son gouvernement n’a pas tardé à approuver l’Ewasme parce qu’il permettra de « former nos agriculteurs pour résorber le gap » et « bâtir la chaîne de valeur riz segment par segment ».
Le ministre sierra-léonais conseille toutefois pour réussir ce projet à « tirer les femmes vers le haut ». Une idée qu’approuve le directeur de cabinet du ministère sénégalais de la Femme, rappelant « l’importance de positionner davantage les femmes dans nos systèmes de production de biens et services ». Pour lui, le gouvernement sénégalais a montré la voie en facilitant « l’accès aux ressources productives » (foncier, financement, compétences) à cette couche souvent jugée vulnérable, mais qui assiste heureusement à « l’évolution des mentalités en faveur de la parité et le genre » dans le pays de Macky Sall.
Rappelant de son côté que « le Sénégal est l’un des grands consommateurs de riz » du continent et a inscrit pour preuve son légendaire « thiébou dieune » (riz au poisson) au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, le secrétaire général du ministère sénégalais de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire affirme que son pays s’oriente « dans une politique hardie de souveraineté alimentaire ».
Cette position a poussé d’ailleurs le gouvernement à élaborer une stratégie nationale de souveraineté alimentaire, de manière « inclusive ». Elle nécessitera un budget de 5000 milliards de francs CFA, indique-t-il. A terme, le Sénégal, qui a « un gap de 1,3 millions de tonnes de riz » sur une production totale de 1,4 million par an, souhaite produire des denrées de base (riz, blé, maïs…) « en quantité et qualité ».
ODL/ac/APA